Se laisser bousculer dans ses certitudes?
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Se laisser bousculer dans ses certitudes?
Je me suis longtemps imaginée, à tord, que tout le monde partageait plus ou moins la même vision de ce qui était bon et bien. Une anecdote, qui a ébranlé cette certitude, nous avait bien fait rire, quelques amis et moi.
Nous avions un ami voué au fauteuil roulant depuis l'âge de quatre ans. Il ressemblait à un myopathe dont la maladie aurait déjà beaucoup progressé, mais il était atteint d'un autre mal, assez rare. Il n'avait plus la force de tenir sa tête ni de soulever un bras. Même de tenir un stylo pour tracer quelques lignes l'épuisait. Il avait besoin de quelqu'un qui passe chez lui plusieurs fois la nuit pour le changer de position. Et, pour vous aider à vous le représenter, il ressemblait plus à un squelette qu'à l'étudiant qu'il était encore à cette époque.
Son "terrible malheur" avait éveillé l'intérêt des membres d'un groupe de prière de son quartier qui voulaient absolument lui imposer les mains en suppliant Dieu d'envoyer sur lui son Esprit afin qu'Il le guérisse. Je les soupçonne de bien plus avoir voulu assister à une guérison miraculeuse qui d'une part aurait fortifié leur foi et ravivé leur élan pour leur prière hebdomadaire commune et d'autre part aurait fait une merveilleuse publicité pour la petite église au profit de laquelle ils militaient avec enthousiasme, que d'avoir eu le coeur déchiré par Christian qui, quand on le fréquentait un peu, n'éveillait pas du tout la pitié. Il était plus riche, de par sa vie intérieure et sa capacité de goûter avec intensité chaque petite joie quotidienne, que la plupart des valides. Mais peut-être suis-je une "mauvaise langue"!
Les membres du groupe de prière se sont rassemblés chez lui un soir, ou un après-midi pour demander donc à Dieu sa guérison. Ils ont chanté des cantiques, ils ont placé leurs mains sur sa tête et ses épaules, ils ont demandé à Dieu de bien vouloir exaucer leur demande légitime pour "un frère souffrant" et ils ont même remercié à l'avance pour le miracle qui allait avoir lieu. Je crois que c'est une manière de faire pression sur Dieu pour l'"obliger" à faire ce qu'on veut qu'Il fasse, et aussi de mettre en pratique la méthode Coué pour augmenter le niveau de sa foi. car, "Si vous aviez la foi comme un grain de sénevé..."
Mais pendant que tout ce cérémonial se déroulait, Christain priait en silence, de toutes ses forces, le même Dieu de surtout ne pas le guérir. La raison? Il ne savait pas comment on s'y prenait pour descendre les escaliers sur ses deux jambes, et l'idée de se rerouver debout le terrifiait.
Quand nous lui avons demandé pourquoi, dans ce cas, il les avait laissé organiser cette séance, il nous avait répondu: "Ils étaient si contents d'avoir grâce à moi l'occasion de faire quelque chose de bien que je ne pouvais pas leur causer de la peine en refusant. Et puis, ils sont si certains que c'est absolument épouvantable d'être handicapé!"
Il me vient une autre anecdote au sujet de Christian. Je lui avais demandé un jour pourquoi il avait choisi d'étudier les maths, pour lesquels il ne se passionnait pas. En se marrant doucement il m'avait répondu: "Pardi! C'est parce que je ne pouvais pas devenir déménageur"!
Si je racontais tout ce que nous avons vécu de joyeux ensemble dans notre petit groupe de valides et d'handicapés, personne ne me croirait. Quand j'essayais de transmettre à mes proches un aperçu de l'atmosphère à la fois dynamisante et détendue qui régnait dans notre petite communauté, je me heurtais à des visages pincés qui voulaient me convaincre du mauvais goût qu'il y avait à rire d'un sujet aussi triste que le handicap! Je les mettais mal à l'aise, car la mine de circonstance qu'ils avaient commencé par prendre en entendant les noms d'Henri, de Christian, de Mireille ou d'un autre ne s'accordait pas avec l'humour des situations décrites.
Je me suis donc très vite tue et mes proches m'ont fait une réputation de "bonne soeur râtée" qui se dévoue pour les malheureux... ce qui est vraiment, mais vraiment, très éloigné de la réalité!
Nous avions un ami voué au fauteuil roulant depuis l'âge de quatre ans. Il ressemblait à un myopathe dont la maladie aurait déjà beaucoup progressé, mais il était atteint d'un autre mal, assez rare. Il n'avait plus la force de tenir sa tête ni de soulever un bras. Même de tenir un stylo pour tracer quelques lignes l'épuisait. Il avait besoin de quelqu'un qui passe chez lui plusieurs fois la nuit pour le changer de position. Et, pour vous aider à vous le représenter, il ressemblait plus à un squelette qu'à l'étudiant qu'il était encore à cette époque.
Son "terrible malheur" avait éveillé l'intérêt des membres d'un groupe de prière de son quartier qui voulaient absolument lui imposer les mains en suppliant Dieu d'envoyer sur lui son Esprit afin qu'Il le guérisse. Je les soupçonne de bien plus avoir voulu assister à une guérison miraculeuse qui d'une part aurait fortifié leur foi et ravivé leur élan pour leur prière hebdomadaire commune et d'autre part aurait fait une merveilleuse publicité pour la petite église au profit de laquelle ils militaient avec enthousiasme, que d'avoir eu le coeur déchiré par Christian qui, quand on le fréquentait un peu, n'éveillait pas du tout la pitié. Il était plus riche, de par sa vie intérieure et sa capacité de goûter avec intensité chaque petite joie quotidienne, que la plupart des valides. Mais peut-être suis-je une "mauvaise langue"!
Les membres du groupe de prière se sont rassemblés chez lui un soir, ou un après-midi pour demander donc à Dieu sa guérison. Ils ont chanté des cantiques, ils ont placé leurs mains sur sa tête et ses épaules, ils ont demandé à Dieu de bien vouloir exaucer leur demande légitime pour "un frère souffrant" et ils ont même remercié à l'avance pour le miracle qui allait avoir lieu. Je crois que c'est une manière de faire pression sur Dieu pour l'"obliger" à faire ce qu'on veut qu'Il fasse, et aussi de mettre en pratique la méthode Coué pour augmenter le niveau de sa foi. car, "Si vous aviez la foi comme un grain de sénevé..."
Mais pendant que tout ce cérémonial se déroulait, Christain priait en silence, de toutes ses forces, le même Dieu de surtout ne pas le guérir. La raison? Il ne savait pas comment on s'y prenait pour descendre les escaliers sur ses deux jambes, et l'idée de se rerouver debout le terrifiait.
Quand nous lui avons demandé pourquoi, dans ce cas, il les avait laissé organiser cette séance, il nous avait répondu: "Ils étaient si contents d'avoir grâce à moi l'occasion de faire quelque chose de bien que je ne pouvais pas leur causer de la peine en refusant. Et puis, ils sont si certains que c'est absolument épouvantable d'être handicapé!"
Il me vient une autre anecdote au sujet de Christian. Je lui avais demandé un jour pourquoi il avait choisi d'étudier les maths, pour lesquels il ne se passionnait pas. En se marrant doucement il m'avait répondu: "Pardi! C'est parce que je ne pouvais pas devenir déménageur"!
Si je racontais tout ce que nous avons vécu de joyeux ensemble dans notre petit groupe de valides et d'handicapés, personne ne me croirait. Quand j'essayais de transmettre à mes proches un aperçu de l'atmosphère à la fois dynamisante et détendue qui régnait dans notre petite communauté, je me heurtais à des visages pincés qui voulaient me convaincre du mauvais goût qu'il y avait à rire d'un sujet aussi triste que le handicap! Je les mettais mal à l'aise, car la mine de circonstance qu'ils avaient commencé par prendre en entendant les noms d'Henri, de Christian, de Mireille ou d'un autre ne s'accordait pas avec l'humour des situations décrites.
Je me suis donc très vite tue et mes proches m'ont fait une réputation de "bonne soeur râtée" qui se dévoue pour les malheureux... ce qui est vraiment, mais vraiment, très éloigné de la réalité!
Amiedetous- Date d'inscription : 28/06/2012
Re: Se laisser bousculer dans ses certitudes?
Les gens n'ont pas conscience qu'un bonheur existe autrement qu'en leur position. C'est une des raisons qui a poussé les gens à tuer les Indiens d'Amérique, certes il y avait le fait qu'ils n'étaient certainement pas humains à leurs yeux, mais il y avait aussi le fait que quelqu'un ou "quelque chose" de si différent d'eux-mêmes ne pouvaient vivre la même chose qu'eux.
Les gens ne rient pas de ce qu'ils ne comprennent pas, ils préfèrent essayer de voir ce qu'ils seraient à leur place. Mais pour votre ami, qui n'a vécu que dans cette condition, il est bien plus simple de vivre ainsi que pour quelqu'un comme moi, sur mes deux jambes depuis tout jeune.
Mais il va sans dire que l'humour est le meilleur des remèdes, le prendre comme une méchanceté ou une incompréhension est une interprétation bien pauvre, malheureusement.
Très bel exemple de vie.
Les gens ne rient pas de ce qu'ils ne comprennent pas, ils préfèrent essayer de voir ce qu'ils seraient à leur place. Mais pour votre ami, qui n'a vécu que dans cette condition, il est bien plus simple de vivre ainsi que pour quelqu'un comme moi, sur mes deux jambes depuis tout jeune.
Mais il va sans dire que l'humour est le meilleur des remèdes, le prendre comme une méchanceté ou une incompréhension est une interprétation bien pauvre, malheureusement.
Très bel exemple de vie.
Re: Se laisser bousculer dans ses certitudes?
Merci pour le temps que vous avez pris à lire ce texte et à rédiger ce commentaire. Je sais et vous savez, que rédiger demande un grand investissement de temps. Or, avec vos études, votre relation amoureuse, la rédaction de vos propres textes, vous n'en avez plus beaucoup. Je le reçois donc comme un cadeau de prix. Merci.
Amiedetous- Date d'inscription : 28/06/2012
Re: Se laisser bousculer dans ses certitudes?
Les études recommenceront à plein temps la semaine prochaine, je risque de disparaître encore une fois du forum...
Les temps passés avec ma fiancée sont malheureusement en suspens chaque dimanche soir à cause de la distance, ma fiancée n'étant toujours qu'au lycée... et reprend le vendredi. Vivement le week-end comme on dit !
C'est un cadeau que je vous offre de tout coeur. De rien.
Les temps passés avec ma fiancée sont malheureusement en suspens chaque dimanche soir à cause de la distance, ma fiancée n'étant toujours qu'au lycée... et reprend le vendredi. Vivement le week-end comme on dit !
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