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5 et 6 juin...

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Message par Jafou Jeu 6 Juin - 8:09

La passerelle
(Histoire de Franck et Frantz)

C’est un espace très vert, mi-prairie mi-jardin. Il y a une jolie maisonnette au toit d’ardoises, queue de castor, gris délavé, avec des murs de colombages bruns et d’ocre torchis, des rideaux bonne femme aux fenêtres.
On voit un banc de bois brun et une corde à linge ; un massif de rosiers. Ce sont de ces roses qui viennent en boutons jaunes crémeux et se carminent aux liserés et aux revers des pétales en s’épanouissant.
Autour, fermant l’enclos, une barrière blanche, soigneusement peinte ; un petit chemin de terre à l’Est.
A l’Ouest, le terrain court en pente douce sur sept-huit cents mètres jusqu’au rebord de la falaise au-delà de laquelle on aperçoit la mer. La falaise est haute, la plage invisible...
De toutes façons la plage a été tellement polluée par les hommes barbares que l’on ne peut plus s’y rendre ; d’ailleurs c’est interdit (verboten) !
Voyez ! Là de grands trous d’où surgissent des morceaux de rails rouillés ; ici de monstrueux tétraèdres en béton, bardés de fil de ronces ; sous le sable, par centaines, des boites de fer noires, rondes, sinistres, assassines. Au sommet de la falaise, sous des couvercles de béton s'alignent de longs tuyaux d’acier...
Depuis des jours, depuis des nuits, la tempête hurle sur la mer. Dans des creux de dix mètres le vent précipite des Niagara d’eau qui implosent en masses d’écume visqueuse comme si des dieux déments faisaient la lessive du monde. A tous les étages du ciel, claquant et sifflant, les rafales poussent des montagnes affolées de nuages sombres. Par moment ils explosent et des grains de violence viennent durement frapper le sol... Ce jour-là comme les précédents !
Nous sommes l’an 1944.
En juin.
Un lundi.
Le 5

°°°°°°°°°°°°°°°°°°

Dans l’après-midi, la tempête s’est assagie, le vent a mollit ; un peu . Même le soleil s’est montré ; très peu...
Alors la maman de Franck, une jolie brunette fraîche et pimpante à la silhouette aimable, est sortie. Avec un bel optimisme elle a dit que ce serait bien le diable si ce peu de soleil et ce grand vent ne lui séchait pas sa lessive en deux petites heures et elle a étendu son linge.
Du coup, le papa de Franck est sorti aussi. Avec son couteau et des brins de raphia il a entreprit de repalisser le rosier que le vent tourmentait.
Franck a prit une grosse balle jaune et s’est mis à jouer dans le près avec le chien de son père : un très bel épagneul au poil savamment truité.
En dépit de la bourrasque c’était un tableau tout simple.
Joliment poétique.
Calme.
Serein.
Paisible...
Mais le linge ne sécha pas et à l’heure du coucher demeura sur la corde... 
°°°°°°°°°°°°°° 
                                                                      
Cela commença minuit passé de longtemps au troisième tiers de la nuit et cela se poursuivit après matines jusqu’au-delà de sixte.
Il y eut d’abord un bruit familier, banal, de passage d’avions en escadres serrées, mais avec un son de moteurs plus fort, une altitude plus basse...
Puis il y eut, celui, terrifiant, de métal arraché que font les bombes en grappes lorsqu’elles déchirent l’air du ciel... Accompagné de celui des impacts au sol.
Le père de Franck cria qu’il fallait descendre à la cave ; elle était vaste, solidement ancrée dans le rocher, voûtée, romane...
Ils y descendirent un à un, le père, la mère, l’enfant et l’épagneul.
On ne savait quoi, mais assurément quelque chose de terrible se produisait ; partout le pays s’embrasait. Les mottes grasses de la terre des prairies défoncées escaladaient le ciel ; des granges, des fermes s’effondraient. Des coupoles de béton gris volaient dans le vent comme des avions de papier.
Les bourgs étaient estropiés ; confondus, des bêtes et des gens mourraient... Au petit matin, quand ne sonna pas l’angelus au clocher de l’église éventrée du village proche, la sombreur nocturne perdit de son épaisseur ; ce n’était pas le jour encore, mais l’horreur et la tempête, ensemble, un instant s’apaisèrent.
Et l’aurore s'annonçât, il y eut par-delà le bord de la falaise comme une brume laiteuse d’aube prête à naître. Le soleil doucement se montra déchirant les derniers voiles...

°°°°°°°°°°°°°°

Et... On ne voyait plus la mer ! Et on ne voyait plus le ciel !! Le fer avait remplacé l’eau et l’acier recouvrait l’azur...
Ils étaient multitude, peints de ces couleurs ternes qu’affectionnent tant les soldats, fantassins ou marins, emplissant l’air, couvrant la mer ; ils étaient l’armada de la punition, l’archange terrible d’une liberté douloureuse...
A nouveau, le feu fut partout. Canons de marine et bombes contre batteries des forteresses côtières... Obus, obus, obus, obus, au but ! Tous les minerais de fer de la terre étaient projetés dans l’espace...
Puis sous ce ciel de démence, au milieu des éclairs et des sifflements assassins, par milliers, de jeunes hommes jaillissant de la mer vinrent comme les vagues mourir en bord de plage... C’est juste à cet instant  que celle-ci changea réellement de nom et pour l’éternité devint Omaha Beach !
Ce fut une aube de tourmente, de fureurs aveugles et de sang ; une aube d’apocalypse et de folie. Et dans les trous, sur les chemins de terre qui courraient la falaise, dans les tranchées, dans les Casemates on entendait les voix gutturales des soldats barbares qui hurlaient :”Achtung, achtung ; teufel, himmel, schnell, schnell.....Ach, sie kommen, sie kommen, sie kommen...
Le matin durant, le jour durant ce ne fut que fracas d’armes automatiques, canons de chars, mortiers et mitrailleuses, grenades et charges creuses ; ce ne fut qu’explosions, embrasements ; dans le vent qui soufflait, sous la pluie qui tombait ce ne fut que multiforme tintamarre...
Quand tomba le soir, des silences nerveux s’installèrent, par instant ; sur des kilomètres de plage il ne restait plus que des engins détruits et des hommes morts... 

°°°°°°°°°°°°°°°°°  

Quand survint le mercredi matin, les bruits s’étaient assourdis ; ils semblaient s’éloigner vers Cherbourg, vers Bayeux, vers Caen. Et la tempête se calma enfin, vraiment.
A quatorze heures le soleil brillait dans un ciel bleu et la brise répandait tout le parfum des roses.
Le père de Franck sortit rassurer ses rosiers. Lorsqu’il vit la mer calmée et l’intense trafic qui y régnait, il comprit que l’essentiel s’était produit, l’impossible, l’impensable avait réussi et il s’assit sur le banc.
La maman de Franck apparut sa corbeille sur la hanche, inspecta la corde et dit en riant que son linge était sec.
Franck, une balle à la main, emmena le chien de son père jouer dans l’herbe ; c’était un très bel épagneul à la toison truitée !
Dans le soleil revenu, c’était un tableau tout simple, joliment poétique...
Si calme.
Si serein.
Si paisible....
°°°°°°°°°°°°°°

Soudain, dans le chemin, à l’est, apparut un char barbare ; une de ces grosses ferrailles à derrière carré qu’on appelait des “tigres”. Trois hommes l’occupaient ; trois hommes, que dis-je ? Trois gamins arrachés au lycée et faits soldats de force au nom du Führer.
Il y avait Hans, le chef, car il avait dix huit ans, puis Wilhelm, le conducteur, qui en avait dix sept et demi et Franz qui a dix sept ans était canonnier-mitrailleur. Tous trois étaient dérisoirement jeunes : tous trois avaient épouvantablement peur et aucun ne savait quoi faire... et surtout pas la guerre !
A l’Ouest, au-dessus des rosiers, trois têtes en casques ronds se hissèrent doucement.
Hans fut saisi de panique ; il cria : “Achtung, Feuier” ! Franz, livide, enfonça tous les boutons devant lui.....
A soixante-dix mètres de là, le père de Franck sauta hors du banc, s’allongea au sol et puis ne bougea plus !
La corde, le linge, la corbeille et... La mère de Franck disparurent... Volatilisés, sublimés !
Tétanisé, Franck était immobile et le temps s’était arrêté... Seul remuait le moignon de queue de l’épagneul aplati contre son pied, comme pour dire un peu d’amitié, de tendresse.
Les casques ronds s’étaient effacés. L’un d’eux reparut près de la barrière. D’un tuyau couché sur son épaule jaillit une flamme puissante ; l’avant du char barbare explosa et prit feu... Hans et Wilhelm ne souffrirent pas ; ils étaient morts avant que ne les lèchent les flammes. Franz eut la jambe droite broyée. Il parvint à soulever le couvercle de cette marmite infernale où tout bouillait, tenta de s’en extraire, mais alors qu’il n’était qu’à moitié dégagé, la douleur explosa et il se plia en deux, évanoui, pendant hors du char comme un pantin cassé....
Près des rosiers, les trois soldats au casque rond enjambèrent la barrière. L’un d’eux fit un furtif signe de croix en longeant le père de Franck près du cratère d’obus puis ils se dirigèrent lentement vers l’épave du char barbare, l’arme pointée.
Ce fut difficile d’extraire Franz du char et de l’allonger ; six bras ne furent pas de trop. De l’une de ses innombrables poches, le plus grand sortit un gros paquet carré enveloppé de cellophane et y préleva de quoi faire un pansement sommaire à la jambe, posa un garrot à la cuisse, fit une piqûre (de morphine ?)  épingla sur la poitrine de l’adolescent un carré de tissus frappé d’une croix rouge où il inscrivit quelques mots et se relevant lança en anglais d’une voix sonore ce mot qui déjà résonnait partout : “brancardiers, brancardiers”.
D’autres hommes franchissaient maintenant la barrière. L’un qui avait à l’épaule quelques gallons frappa le dos de Franck d’une claque amicale et lui dit des mots inconnus en mâchant de la gomme. Mais ce sont des mots qui en toutes langues signifient :”Ne reste pas ici gamin, va jouer plus loin et laisse les grandes personnes faire leur job !”
Alors ; alors seulement, lentement Franck s’effondra dans l’herbe...  

°°°°°°°°°°°°°°°°    

Et les années vinrent s’inscrirent, points imperceptibles sur le ruban du temps. 

°°°°°°°°°°°°°°°°  

Franck a reprit le chemin du lycée et y a terminé ses classes secondaires sous la tutelle d’un oncle qui l’avait pris en charge. Puis il a apprit à travailler les bois de coques, à entretenir, à réparer les mécaniques. Il sait souder, caréner, calfater, peindre et goudronner. Il a rouvert le petit chantier de son père. Comme lui, il est devenu le médecin des barques de pêche et de quelques bateaux de plaisance ; parfois à la demande il en construit ; des petits, des faciles.
Longtemps il a gardé au-delà de la rétine les images inexpiables ; il est resté sombre, renfermé, douloureux. Et puis la vie a de nouveau bouillonné en lui ; cette vie qui paradoxalement mais heureusement gagne toujours. Il a voulu être bien en lui-même, s’épanouir, être heureux.
Au hasard des sorties dominicales, sur la côte, il a fait avec des copains la connaissance d’une jolie blondinette, fraîche et pimpante à la silhouette aimable.
Ils se sont aimés, tout bêtement.
Quand on s’aime très fort, l’amour est vite fécond... Allez savoir pourquoi, ils l’ont baptisée “Camélia” ! Camélia, rose et blanche, et douce, douce, avec de grands yeux bleus... Franck habite de nouveau la maisonnette dans l’enclos ceint de barrières blanches. La maman de Camélia y a rajouté un peu plus de confort et Franck a planté un second buisson de rosiers dans le trou, là où il y eut jadis une corde à linge....
Camélia fréquente l’école du bourg voisin entièrement reconstruit ; elle apprend bien à ce qu’il parait !
Le dimanche, tandis qu’en chantonnant, sa femme fait mille choses, après avoir soigné ses rosiers, Franck s’assied pour fumer sa pipe sur le banc de bois bruni.
Plus loin, dans l’herbe de l’enclos, Camélia joue en lançant une grosse balle jaune au chien de son papa ; un vraiment très bel épagneul au pelage truité...
La bas, au-delà de la falaise, la mer moutonne ; on ne voit pas la plage !
C’est un tableau tout simple, joliment poétique.
Si calme.
Si serein. 
Si paisible !   

°°°°°°°°°°°°°°°°     

Et de nouveau les ans s’écoulent
Camélia est une demoiselle de grande vitalité. Elle a parcouru comme un météore toutes les étapes qui vont du dernier biberon à la première pilule. Elle est devenue une superbe jeune femme, moderne, qui porte des Jean’s ajustés et des tee-shirts américains. Elle est indéniablement belle avec ses cheveux dorés qu’elle porte courts, ses rondeurs douces et son allure de jeune pouliche. Elle aime le rock, elle aime danser, elle aime la voile et les copains ; peut-être même Un copain, à l’occasion ; mais elle n’est ni dévergondée, ni écervelée.
Elle a fait de bonnes études, très bonnes même. Maintenant elle habite à Caen, seule ; elle enseigne, au lycée. Elle est madame le professeur d’allemand...
Pourquoi l’allemand ? Les cheminements de l’esprit sont obscurs. Dés le collège elle a aimé le velours littéraire de cette langue pourtant si gutturale, hurlée dans des bouches soldatesques. Elle a aimé ses chuintements, ses rondeurs graves et ses mots interminables.
Alors elle a choisi de l’enseigner. Parce que, tout de même, c’est Bach, Mozart, Brahms, Beethoven. Parce que c’est Schubert, Schumann, Haydn et Wagner. Parce qu’enfin c’est Kant, Nietzsche, Schopenhauer ; c’est Schiller, c’est  Gœthe... C’est Brecht !
C’est encore Einstein, Oppenheimer, Planck, Marx, Freud !
C’est tout le désespoir romantique, la philosophie, les sciences de demain ; c’est von Braun et c’est Karajan, c’est le génie de la musique...
C’est aussi le passé récent d’une fuite dans l’horreur ; le rêve fou d’un empire pour mille ans : ein Volk, ein Reich, ein Führer. C’est la triste saga d’un petit brun moustachu qui n’aimait pas les juifs, ni les communistes, ni les Gitans, les nègres, les arabes, les levantins, les métèques et les autres et voulait en purger la planète !
C’est vrai, elle sait !
Mais elle se dit que c’est le passé, une parenthèse de folie ; qu’au delà de l’horreur absolue du meurtre institutionnalisé, Staline et Napoléon, Genghis Khan et Attila, Alexandre et Jules César n’étaient pas des tendres non plus et faisaient peu de cas de la vie, pas plus que Pizzare ou Cortez et combien d’autres “grands Capitaines”, conquérants et bâtisseurs d’empires....
Alors, quand dans sa classe, les yeux mi-clos, elle entend une voix juvénile, hésitante, trébuchante qui récite : 
“Der Luft ist kuhl und es dunkelt
Und ruhig fliess der Rhein......”
Ou encore, une voix plus grave
“Mein Vater, Mein Vater”...” 
          qui chute sobrement
“Das Kind war tod”.....” 
Elle pense souriant en elle même que la langue vient d’entrer en musique... Ah, Mahler...
Avec des groupes d’étudiants, Camélia avait voyagé ; elle avait parcouru l’Autriche, la Rhénanie, la Bavière. Elle avait adoré Vienne, aimé Salzbourg, s’était émerveillée devant les châteaux de Louis ll, ce roi fou qui préférait un opéra à sa couronne ; avait communié à Bayreuth, à Leipzig.
Elle ne parvenait pas à comprendre comment des peuples si proches, qui avaient tant en commun, avaient pu pareillement se haïr... Mais en Pologne elle avait été à Oswiécim qu’en allemand on appelait Auschwitz...

°°°°°°°°°°°°°°°  

Parfois le dimanche, quand il n’y a ni voile, ni sortie, ni copain, elle se rend à la maisonnette de l’enclos, la-haut, sur la falaise. Elle s’assoit avec sa mère sur le banc de bois brun et elles parlent, parlent, parlent en riant tandis que papa caresse ses roses de la main et des yeux.
Elle joue aussi à lancer une grosse balle jaune au chien de son père, un sacré épagneul dont la robe est superbement truitée ! Et le jour s’écoule doucement ; cela fait un tableau tout simple, joliment poétique !
Si calme.
Si serein.
Si paisible...

°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°



Franz fut transféré de l’autre côté de la Manche, dans un hôpital où il fallut l’amputer de sa jambe, puis dans un camp de prisonnier.
Un jour, longtemps plus tard, il se retrouva libre ; libre de retourner vivre dans ce pays qui s’essayait à n’être plus barbare et était le sien.
Il regarda sortir des ruines un monde qui courrait après son honneur perdu. Il reprit ses études, fit l’apprentissage d’une jambe mécanique que les “savants” adaptèrent au moignon conservé et marchant un peu raide mais sans cane, devenu architecte, il travailla à reconstruire.
Près de Munich (Munchen) son chemin croisa celui d’une jeune femme blonde et rose aux yeux de porcelaine bleue pâle. C’était une appétissante bavaroise, généreuse sans être forte, avec des formes rondes et pleines ; une vraie “Gretchen” de livre d’images, “eine gnädige jungfrau, sehre schœn, gemutlich ; en anglais : a nice girl very glamourous ; en français : une meuf vachement canon !
Franz aima Munich, la bavaroise, la bière, la choucroute mit kartofell,et tout simplement vivre enfin...........
Ils appelèrent leur fils : “Franz le deuxième” !
Et la bas aussi les années s’écoulèrent...
°°°°°°°°°°°°°°°°° 

Franz le deuxième est devenu un homme vigoureux ; sportif, beau, il est apolitique et déteste tout ce qui peut de près ou de loin ressembler à un soldat, une armée ; comme dans son pays tant de jeunes de sa génération.
Après de solides études au gymnase, il est entré à l’université où un sourd besoin l’a poussé vers l’histoire ; parce qu’il ne comprend pas très bien celle, récente, de son pays. Elle lui semble occultée comme si cette nation, grande, à laquelle il appartient venait de naître d’un long sommeil, vierge et sans réalité internationale.
Oh, il sait qu’il y a eut une guerre immense (on ne peut pas cacher une telle chose) qui a embrasé la planète, déclenchée et perdue comme la précédente par son pays. Tout cela fait parti d’un contentieux territorial vieux de plus d’un siècle : l’Espace Vital allemand (Pologne, Autriche, Alsace, Lorraine).
Mais il ne comprend pas cette sorte de satisfaction douloureuse qu’ont des gens comme son père à dire qu’ils ont été vaincus, ont dû capituler sans conditions et que c’est ce qui pouvait leur arriver de meilleur.
Il ne comprend pas toutes ces réticences gênées, ces regards qui se détournent, ces hochements de tête, cette inexistence politique de ses aînés.
Il est conscient que quelque chose de terrible hypothèque le passé, qu’une guerre n’explique pas mille pestes à la fois... A force de harceler anciens et professeurs, derrière les fuites et les silences, il a fini par se faire expliquer Weimar et Nuremberg, la nuit de cristal et celle des longs couteaux.
Avec une horreur croissante, voyageant en Europe dans le cadre des échanges culturels et des rencontres d’étudiants, face à bien des reculs, bien des rejets, il a dû convaincre pied à pied qu’il était le fils d’un pays neuf, géant et nain, sans passé.
L’humilité horrifiée et sourdement responsable, c’est le prix qu’il a dû payer pour apprendre le lourd poids de mots tels que : “Juifs, sous-humanité, camps, solution finale, holocauste”.
On lui a montré sans ménagement que l’abominable est sans limite, qu’à chaque instant le pire cache encore pire et qu’une nation toute entière (la sienne) plongée dans une folie hypnotique peut cesser d’appartenir à l’espèce humaine !...Monstre...
Maintenant il sait !

°°°°°°°°°°°°°°°°°°

 Franz le deuxième est devenu professeur d’Histoire ; sa spécialité est l’Histoire contemporaine. Il a eut quelques petits postes, prit quelques gallons. Maintenant que se fait l’Europe il a demandé à enseigner en France. Il a été lecteur, assistant, puis les accords de coopération jouant il est désormais professeur de lycée, en France :
A Caen !!!
Pourquoi la France ?
La vieille attirance romantique... Parce que l’extraordinaire explosion scientifique et philosophique des “Lumières”, 1789, les droits de l’Homme, un nouveau départ de l’humanisme.
Parce que Villon, Marie de France, Ronsard, Rabelais ; la trilogie Corneille, Racine, Molière plus La Fontaine, plus Boileau... Parce que, Pascal, Montesquieu, Montaigne, Sainte-Beuve... Et Musset, Lamartine, Chateaubriand, Hugo... Et encore Verlaine, Baudelaire, Rimbaud, Mallarmé, Nerval, Apollinaire... Et donc Eluard, Aragon, Prévert, Cocteau, Sartre...Et encore Balzac, Zola, Romain, Anouilh, Giraudoux... Tant d’autres !
La France, parce que Josquin des Près, Marin Marais, Rameau, Couperin.... Et Delalande, Gilles, Campra, Charpentier... La France de Berlioz, Ravel, Faure, Debussy; la France des Alain, Duruflé, Messiaen... La France des savants de Pascal à Pasteur, de Laënnec aux Curie, Perrin, Langevin, Broglie.
Et cette autre France encore des images, celle de Géricault et David, Delacroix et Boucher, Cézanne, Matisse, Braque ; Vinci et Picasso, devenus si français comme van Gogh... Utrillo, Gauguin, Lautrec... Et tant et tant de Rhudes, de Rodin, de Claudel, de Maillol.
La France, compacte, terrienne, concrète, de l’Aquitaine à l’Artois ; de la Provence à l’Ardennes ; de la Bretagne aux Alpes et du Roussillon aux Vosges. Avec son fourmillement de paysages changeants et sublimes ; avec son grouillement de châteaux, de Cathédrales, Monastères, Abbayes. Saint Michel défiant Carcassonne ; Chartres, vaisseau unique sur champs de céréales... Et la Sainte Chapelle, presque cachée, oubliée, si merveilleusement unique... Ah oui, la France grommelant, ronchonnante, mesquine et sublime ; magnifique, rebelle, bravache et indisciplinée ; gouaillante, amoureuse et rigolarde. La France où les plus jolies parisiennes sont des provinciales immigrées de la veille ; où la frite flamande a séduit le poulpe provençal et où les Princes de Soubise donnent leur nom à une purée d’oignons, et le duc de Pralin à une cacahuète confite !...
Détestable France... Adorable France... Unique ! 

°°°°°°°°°°°°°°°°°° 

Cela s’est fait presque tout seul !
Dans une salle des professeurs, forcément on se croise, on parle, on sourit. On compare les mérites des élèves... Et leurs carences ; puis on parle de soi... Un peu. Tout de même quand on œuvre ensemble il faut se connaître ; non ?
On se découvre des intérêts, des goûts rivaux, complices ou complémentaires. Dans le premier cas on veut convaincre ; dans le second, on partage...
Très vite, ils ont beaucoup partagé !
Il lui plaisait infiniment, à Camélia, ce prof discret, ce beau garçon qui contemplait la mer, émerveillé, pendant des heures en fredonnant interminablement des extraits d’airs du “Vaisseau Fantôme”
Une chose l’avait profondément touchée :
Il était allemand ; tout le monde le savait. Cela n’avait pas été sans créer certaines tensions ; au début. Le temps et la gentillesse intelligente du jeune homme avaient fait leur travail et occulté les préjugés défavorables.
Il était allemand ; tout le monde l’oubliait !
Un jour, elle était entrée dans sa classe pour lui poser une question banale concernant l’un de leurs élèves commun.
Il parlait à son auditoire de la seconde guerre mondiale, (on disait déjà comme cela dans les années 80 ; quarante ans avaient passé. Cette guerre était devenue de l’Histoire !), et surtout il leur parlait du nazisme.
Cette rage sourde, cette colère douloureuse qui habillaient ses propos, enflammaient son regard, rendaient ses gestes saccadés, nerveux, fiévreux ; la violence, la dureté des mots qu’il employait pour stigmatiser l'infamie nazie, l’avaient frappée comme un choc brutal. Elle avait sentie toute la détresse désespérée sous-jacente à ses propos. Celle de toute une génération orpheline d’estime pour ses pères... 
Il était allemand ; c’était pour lui une pancarte déshonorante accrochée à son cou...
Enfant, elle avait communié au long chagrin de son père. Elle savait le prix de la dignité de la souffrance secrète ; cela la rapprocha encore de lui.
De cet instant elle l’intégra à ses loisirs ; l’emmena en mer, lui fit partager sa passion en l’initiant aux joies de la voile, (Munich ne vous prédispose pas à ces jeux-là) ; elle lui fit goûter aux plaisirs simples des longues promenades en suivant le bord découpé des falaises entre l’embouchure de l’Orne et la pointe du Hoc, témoins silencieusement éloquents du passé proche.
Il la fit entrer dans le monde de la musique et des poètes dans une approche qui n’avait plus rien de professorale.
Bon, je ne vous ferais pas saliver ni attendre ; du reste vous avez déjà tous compris ! Ils s’aimèrent, jeunes gens de la nouvelle Europe, dans le claquement clair des voiles aux sons ineffables de la musique de Schubert...
Un jour de vent, en lui tenant la main, elle l’emmena à la maisonnette, chez Franck.
A ses parents elle présenta cet Allemand si français, au regard limpide et à l’évidente réserve.
Franck hésita un temps entre un accueil froid et protocolaire, roide, et son habituelle bonhomie. Ce fut celle-ci qui l’emporta face à la muette supplique du regard de Camélia ; quelque chose en lui martelait :”Assez de dégâts, de haines, de silences hostiles ; assez, assez, assez...”
Quand vint le déclin du jour, Frantz le jeune était de la maison... Presque !
L’Allemand était gommé laissant ce beau et sportif jeune homme développer son charme et les facettes nombreuses de son intelligence. 
Il aimait Camélia, il en était aimé ! Inutile de le dire ; tout aussi inutile de le cacher. Même le chien en était conscient !
Au moment où le soleil sur la ligne marine de l’horizon entama sa quotidienne et nocturne baignade, il les trouva tous assis sur le banc de bois brun, baignés par le parfum des roses.
Seul dans l’herbe le chien de Franck un magnifique épagneul à la toison truitée jouait avec une grosse balle jaune que lui lançait Camélia.
Le tableau était tout simple et poétique.
Si calme.
Si serein
Si Paisible...
°°°°°°°°°°°°°°°

Quand vinrent les vacances, Frantz le jeune se rendit à Munich passer un moment de tendresse auprès de ses parents.
Sans savoir les souvenirs tristes qu’il ressuscitait chez son père, il parla, parla et reparla encore de la Normandie, de sa mer étroite, de ses falaises hautes, de la gentillesse et de la bonhomie matoise des Normands. Il parla d’une jeune Normande, belle, intelligente et adorable pratiquant l’allemand comme une seconde langue maternelle ; il en parla jusqu’à saturer tous les échos ambiants.
Il montra des photos de la Normandie, de la Normande et de la maisonnette familiale, sur la falaise, qu’une barrière blanche clôturait au long d’un chemin creux...
Cette nuit-là une image rivée au fond des yeux de Frantz le priva de tout sommeil...
Au matin il questionna son fils sur Franck le père de cette Camélia, et au fur et à mesure que s’imposait l’impossible vérité, un froid de mort s’infiltrait dans chaque fibre de son corps.
Bien vite il n’y eut plus aucun doute ; Camélia était la petite fille du couple qu’il avait fait mourir... 
Les jours suivants, il se lança, désespéré, dans un long discours-plaidoyer pour dissuader son fils de se laisser entraîner à caresser des projets d’avenir avec sa jeune amie : La guerre était trop proche dans les cœurs, les esprits ; les deux nations trop meurtries et encore hostiles ; il y avait entre elles une muraille de morts si haute que tendre déjà la main pardessus n’était pas pensable. D’une voix sourde, inconnue, imperceptible, il conclut ses propos en disant : 

  • Pour les Français, pour les Normands, nous sommes les bourreaux et leurs fils nourris par une Nation qui s’est déshonorée”. 

Mais il sut aussitôt, bien au fond de lui qu’il avait perdu... Ce qui en définitive n’était que justice !
Frantz le jeune fut à son tour véhément, passionné, voulut convaincre :
Il dit refuser d’être la victime expiatoire d’une monstruosité qui n’était pas sienne ; que le fascisme n’était ni sa vitrine nationale ni sa culture familiale ; que ce n’était pas en campant raides et muets derrière des frontières artificielles et en cultivant le romantisme du désespoir que l’on ferait bouger les choses.
Sa péroraison éclata avec ferveur dans la déclaration qu’il fit qu’en mariant entre eux les enfants des deux ennemis d’hier, on en finirait une fois pour toute avec ces antagonismes d’un autre siècle et qu’on pourrait enfin en construisant une Europe de chair, panser les blessures de l’inqualifiable parenthèse nazie...
Il termina, lumineux : 
- Je vais épouser Camélia... Si elle veut bien !

°°°°°°°°°°°°°°°°°°

Resté seul, Franz a pensé et repensé à tout ce qui s’était dit.
Pendant des semaines il a été hanté par le désir de s’enfuir, de quitter tout, tout le monde et les siens. Comment dire à Frantz le jeune que cette union est impossible. Comment lui expliquer qu’il est lui, son père, le meurtrier des parents de Franck ; bien involontairement, sans doute, mais qu'est-ce que cela change ?
Si Camélia ne connait pas ses grands parents, c’est par sa faute ; comment revenir la dessus ?
Puis un jour tout est redevenu clair. Il s’est dit qu’après avoir brisé l’adolescence de Franck, il n’allait pas détruire les vies de son fils et de cette jeune fille inconnue ; tous deux également innocents et ignorants du passé !
Alors, sans rien dire à personne, eh bien, il est venu en Normandie.
Un dimanche, il s’est rendu sur la falaise et a frappé à la porte de la maisonnette.
C’est Franck qui a ouvert. Il lui a dit qu’il était le père de ce jeune professeur ami de sa fille et qu’il voulait lui parler de leurs enfants. Franck a sourit et lui a proposé de s’installer avec lui sur le banc de bois brun pour y fumer une pipe ensemble.
Un long silence s’est installé pendant que les deux hommes contemplaient la Manche au loin.
D’une voix basse, grave, Frantz a dit :
-  Je connais cet endroit ; j’y suis venu quand j’avais dix sept ans”
Franck a soulevé un sourcil interrogateur et l’a regardé pensivement.
-  C’était un jour de folie où la terreur m’habitait. J’étais un lycéen que l’on avait enfermé de force dans un char... Et j’attendais ma mort à chaque instant”.
Franck s’était levé ; il contemplait avec stupeur cet homme à l’angoisse et à la douleur si visible dont le visage de fantôme ruisselait de sueur.
Frantz continua :
-  Il y avait une femme et un homme, là, tout prés...  et aussi un petit garçon et un chien ; et puis il y a eu ces soldats américains et la peur, la peur et l’ordre de tirer de mon chef... Alors j’ai pointé le canon sur la haie, mais mes mains tremblaient tellement que je ne parvenais pas à stabiliser la tourelle. J’ai enfoncé tous les boutons...
J’ai vu, je les vois encore, je les verrais toujours... la femme disparaître dans un éclat de lumière et l’homme tomber au sol. C’étaient vos parents, n’est-ce pas ?
Je les ai tués”....
Il eut un sanglot sec et ajouta :
- Après je ne me souviens plus, d’une certaine façon je suis mort aussi...    longtemps !
Franck, je n’attend de vous ni compréhension, ni pardon, ni oubli... Mais nos enfants ? Avez vous senti comme ils s’aiment ? Sont-ils coupables, doivent-ils être punis ? Ils veulent substituer l’amour à la haine ; avons-nous le droit du refus ; devons-nous dire : non ; dire pourquoi ; les entraîner dans notre enfer ?”
Sur ces derniers mots le silence tomba ; un silence pesant, épais, interminable ; lourd de tous les questionnements, attaqué par les rancœurs, rongé par des sursauts de colère, baigné de chagrin...
Beaucoup, beaucoup de temps s’est écoulé.
Quand Franck a parlé, sur son visage, un sourire hésitait, timide. Sa main s’est tendue puis il a dit :
- On ne leur dira rien et... Peut-être que nous pourrions essayer d’être grands-pères ensemble ... 

°°°°°°°°°°°°°°°

Nous voici parvenus au dernier tableau de mon histoire.
Quelques années encore ont passées et le siècle court vers sa fin.
Bien sûr, on a marié Frantz le jeune et Camélia. Ils enseignent toujours à Caen, font de la voile, de longues marches et écoutent de la musique en lisant les grands poètes de l’Europe. C’est dans cette musique des mots et des sons qu’ils baignent les premiers éveils à la vie de leur petite fille Francine qui courre sur ses six ans et parle deux langues...
Ce soir-là ils dînent en famille dans la maisonnette sur la falaise.
Il y a là Franck et Frantz et leurs épouses qui conspirent en riant ; il y a Frantz le jeune et Camélia qui se caressent des yeux ; il y a Francine pour qui tout est source d’émerveillement, de bonheur et de découvertes. Nous sommes à la fin de l’été 1991. Les jours sont encore longs.
Mais vient le soir.
Par les fenêtres on aperçoit les silhouettes des deux grands mères qui organisent la journée du lendemain.
Camélia et Frantz le jeune, sont assis, accolés l’un à l’autre au bord de la falaise et regardent la mer qui rougit et s’argente dans la lumière du crépuscule.
Frantz et Franck sont assis sur le banc de bois brun et complices fument leur pipe dans le silence de l’amitié.
Dans l’herbe, près des rosiers qui fleurent bon l’été épanoui, Francine joue avec une grosse balle jaune qu’elle lance aussi loin qu’elle peut et que se disputent les chiens de son père et de son grand père, deux vigoureux épagneuls à la robe admirablement truitée !..
Sur le près l’ombre de la maisonnette au crépis ocre et aux bruns colombages s’allonge lentement. Un friselis d’écume court sur les vagues de la Manche ; on ne voit pas la plage dissimulée sous la falaise...
Cela ressemble un peu à l’une de ces toiles des peintres du XVlllè siècle qui affectionnaient tant les scènes pastorales.
C’est si joliment poétique.
Si calme.
Si serein.
Si paisible...
°°°°°°°°°°°° 

Sans se regarder, sans parler, les deux hommes songent presque ensemble qu’il eut mieux valu que l’on commença par là. On aurait évité cinquante millions de morts.
Cinquante millions, c’est un chiffre qui interpelle, qui impose le respect dans l’horreur.
Il pensent aussi que cette adorable petite fille jouant avec les chiens, c’est un peu la passerelle que se jettent entre eux deux moments de l’histoire de leurs pays et de leurs peuples. Une passerelle encore fragile qu’il faudrait consolider sans relâche, qu’il faudrait multiplier jusqu’à ce qu’elle devienne un pont, un viaduc, une voie triomphale annulant les frontières, faisant à jamais taire les armes... 
Parce que, au-delà du tableau bucolique,  par-delà la barrière blanche et le chemin creux en retrait, là où frissonnant dans le vent il aurait dû y avoir jusqu’au delà de l’horizon toute la blondeur vénitienne des moissons à venir pour nourrir les sans rien, les exclus, les affamés du monde, ils savaient sans tourner la tête qu’il n’y avait, passé l’enclos, moutonnant jusqu’au delà de tout regard, que des hectares, des hectares, toujours et encore des hectares de croix de marbre blanc, ces arborescences minérales et vénéneuses dont la fleur est faite de chagrin et  le fruit de larmes brûlantes...
De la maisonnette parvenait assourdie la mélodie douce amère de la Valse triste de Sibelius... 
Jafou
Jafou

Date d'inscription : 01/06/2011
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