Lettre à ma belle-Maman
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Lettre à ma belle-Maman
Ma p’tite Maman,
Il me reste tant de choses à te dire. J’avais encore tellement de conseils à te demander. Mais je ne le pourrais plus désormais. Tu es partie si vite, je n’ai même pas pu te revoir. Tu laisses un vide derrière toi, les gens qui t’entourent t’aiment si fort. Moi aussi je t’aime fort, et tu me manques déjà. Je t’écris cette lettre bien que je sache que tu ne pourras jamais la lire, plus pour pouvoir coucher les mots, ceux que j’aurais voulu te dire, je pense. Mais ça restera un secret, quelque chose qui restera entre moi et moi, car jamais je n’ai eu le courage, ni même ne serait-ce que la pensée de te le dire directement. Ton départ a été si brusque. Tu as été longtemps malade mais jamais je n’aurais cru un seul instant que tu t’en aille, comme ça, un jour, parce que trop fatiguée. Je te voyais si forte, si souriante et aillant traversé tant d’épreuves et de difficultés que pour moi, un simple séjour à l’hôpital resterai un simple séjour à l’hôpital, dont on aurait ri au dîner de Noël, sans se souvenir vraiment de ce que tu avais traversé à ce moment-là. Tu sais, j’ai encore du mal à réaliser. Et il faut que tu saches que je te trouvais très courageuse, très forte. Tes enfants se retrouvent seuls et ils soutiendront, je le sais, autant qu’ils le pourront, leur petit Papa. Moi j’avais déjà perdu le mien. C’est différent, le mien l’avait choisi, mais c’est douloureux tout de même de perdre un proche. Maintenant, je me sens orpheline, comme si j’avais perdu ma propre mère. Tu as bien sûr fait plus pour moi en 5 ans dans ma vie que ma propre mère ne l’a fait en 24 ans. Je crois que je n’arriverais pas à pleurer pour elle autant que pour toi. Est-ce que pour autant je suis sans cœur ? Ou est-ce que finalement ça reste quelque chose de tout à fait compréhensible ? Pour ceux qui savent ce que j’ai traversé avec ma mère, je pense que ça l’est. Je n’ose pourtant pas en parler autour de moi, j’ai peur que les gens me jugent, qu’ils disent que je ne suis pas une fille convenable qui devrait aimer sa mère et laisser celle des autres tranquille. Alors je me tais et je le garde pour moi, comme tant d’autres secrets lourds à porter… Erwan ne comprend pas. Pour lui, dans les films, quand les gens sont morts, ils reviennent toujours à un moment donné. Soit dans le même film, soit dans un autre, soit en remettant le film au début. Et puis les gens ont peur de ce mot : « mort », c’est pourtant le terme à utiliser. Il n’est ni frappé d’un tabou, ni maudit, mais quand on sait que la mort fait peur aux gens, on peut comprendre qu’ils en détestent le terme. Pour un enfant, c’est de l’abstrait tout ça, et pour moi qui ne suis ni croyante, ni pratiquante, j’avoue que j’ai un peu de mal à lui faire comprendre pourquoi tu n’es plus là. On lui dit que tu es parti. Alors bien sûr, en toute logique, il demande : « mais elle est partie où Mamie ? », ce par quoi je ne sais pas quoi répondre. Il comprendra en grandissant, je ne m’en fais pas. Mais du coup, il a une sorte d’absence de réaction, dû à son jeune âge et à son innocence que les adultes ne comprennent pas toujours. Pour eux, le deuil doit forcément être triste et dénué d’un sourire sur le visage d’un bambin de 3 ans. C’est idiot, je trouve. Non pas que je ne sois pas malheureuse, mais ce sourire reste une preuve que la vie continue qu’il faut relativiser et arrêter de s’apitoyer sur son sort. Cela nous fait du mal et ne résout en aucun cas le problème : ton départ. Parfois je me dis que c’est mieux comme ça, au moins, maintenant, tu ne souffres plus. Tu t’es endormie et ton cœur s’est arrêté doucement, en serrant la main de deux de tes enfants et en pensant à tous les autres… Tu ne seras plus branchée de partout, souffrant le martyr car interdiction d’antidouleurs, attachée car souffrant trop, tu te débattais… Maintenant, tu es sereine, et détendu, plus aucune trace de souffrance sur ton visage reposé. C’est ce qui est beau dans la mort, ce côté apaisant… J’espère seulement, et c’est égoïste, que tu m’aimais bien et que quoi qu’il se passe après, tu continueras à penser à nous. Nous, on ne t’oubliera jamais. Ton image s’estompera bien sûr avec le temps, et ton sourire aussi… Mais il restera les photographies des moments passés avec toi, que l’on pourra regarder tout notre saoul quand on pensera que ton souvenir est trop loin dans notre mémoire. Et puis, tu as laissé un morceau de toi dans chacun de tes enfants… Pour moitié, ils sont toi, et pour l’autre moitié ils sont de Papi… Alors à part dans notre cœur, le plus beau souvenir que nous aurons de toi, c’est de regarder ces gens que tu as portés, que tu as façonnés à ton image pendant neuf mois, avant de les mettre au monde ( huit fois quand même, ce n’est pas rien), et de les élever le mieux possible. Ils sont toi, ils le resteront, je prendrais soin de l’un d’entre eux, c’est une promesse… Maintenant, tout comme pour mon père, j’aimerais te dire que j’aurais aimé que tu connaisses ton 18ème petit enfant (qui selon moi sera une fille, bien que je sois incapable de t’expliquer pourquoi)… Mais on ne choisit pas toujours comment les choses se déroulent. J’aurais encore tant d’autres choses à te dire, mais il est temps je crois, de trouver la force de te dire au revoir ma p’tite Maman. Tout comme les autres, il me faut te laisser partir. C’est comme ça. Je ne te demanderais qu’une seule chose, si jamais elle est possible : dis bonjour à mon père et dis-lui que je l’aime.
Je t’embrasse et si jamais il y a autre chose après, espère te revoir.
Noë
Il me reste tant de choses à te dire. J’avais encore tellement de conseils à te demander. Mais je ne le pourrais plus désormais. Tu es partie si vite, je n’ai même pas pu te revoir. Tu laisses un vide derrière toi, les gens qui t’entourent t’aiment si fort. Moi aussi je t’aime fort, et tu me manques déjà. Je t’écris cette lettre bien que je sache que tu ne pourras jamais la lire, plus pour pouvoir coucher les mots, ceux que j’aurais voulu te dire, je pense. Mais ça restera un secret, quelque chose qui restera entre moi et moi, car jamais je n’ai eu le courage, ni même ne serait-ce que la pensée de te le dire directement. Ton départ a été si brusque. Tu as été longtemps malade mais jamais je n’aurais cru un seul instant que tu t’en aille, comme ça, un jour, parce que trop fatiguée. Je te voyais si forte, si souriante et aillant traversé tant d’épreuves et de difficultés que pour moi, un simple séjour à l’hôpital resterai un simple séjour à l’hôpital, dont on aurait ri au dîner de Noël, sans se souvenir vraiment de ce que tu avais traversé à ce moment-là. Tu sais, j’ai encore du mal à réaliser. Et il faut que tu saches que je te trouvais très courageuse, très forte. Tes enfants se retrouvent seuls et ils soutiendront, je le sais, autant qu’ils le pourront, leur petit Papa. Moi j’avais déjà perdu le mien. C’est différent, le mien l’avait choisi, mais c’est douloureux tout de même de perdre un proche. Maintenant, je me sens orpheline, comme si j’avais perdu ma propre mère. Tu as bien sûr fait plus pour moi en 5 ans dans ma vie que ma propre mère ne l’a fait en 24 ans. Je crois que je n’arriverais pas à pleurer pour elle autant que pour toi. Est-ce que pour autant je suis sans cœur ? Ou est-ce que finalement ça reste quelque chose de tout à fait compréhensible ? Pour ceux qui savent ce que j’ai traversé avec ma mère, je pense que ça l’est. Je n’ose pourtant pas en parler autour de moi, j’ai peur que les gens me jugent, qu’ils disent que je ne suis pas une fille convenable qui devrait aimer sa mère et laisser celle des autres tranquille. Alors je me tais et je le garde pour moi, comme tant d’autres secrets lourds à porter… Erwan ne comprend pas. Pour lui, dans les films, quand les gens sont morts, ils reviennent toujours à un moment donné. Soit dans le même film, soit dans un autre, soit en remettant le film au début. Et puis les gens ont peur de ce mot : « mort », c’est pourtant le terme à utiliser. Il n’est ni frappé d’un tabou, ni maudit, mais quand on sait que la mort fait peur aux gens, on peut comprendre qu’ils en détestent le terme. Pour un enfant, c’est de l’abstrait tout ça, et pour moi qui ne suis ni croyante, ni pratiquante, j’avoue que j’ai un peu de mal à lui faire comprendre pourquoi tu n’es plus là. On lui dit que tu es parti. Alors bien sûr, en toute logique, il demande : « mais elle est partie où Mamie ? », ce par quoi je ne sais pas quoi répondre. Il comprendra en grandissant, je ne m’en fais pas. Mais du coup, il a une sorte d’absence de réaction, dû à son jeune âge et à son innocence que les adultes ne comprennent pas toujours. Pour eux, le deuil doit forcément être triste et dénué d’un sourire sur le visage d’un bambin de 3 ans. C’est idiot, je trouve. Non pas que je ne sois pas malheureuse, mais ce sourire reste une preuve que la vie continue qu’il faut relativiser et arrêter de s’apitoyer sur son sort. Cela nous fait du mal et ne résout en aucun cas le problème : ton départ. Parfois je me dis que c’est mieux comme ça, au moins, maintenant, tu ne souffres plus. Tu t’es endormie et ton cœur s’est arrêté doucement, en serrant la main de deux de tes enfants et en pensant à tous les autres… Tu ne seras plus branchée de partout, souffrant le martyr car interdiction d’antidouleurs, attachée car souffrant trop, tu te débattais… Maintenant, tu es sereine, et détendu, plus aucune trace de souffrance sur ton visage reposé. C’est ce qui est beau dans la mort, ce côté apaisant… J’espère seulement, et c’est égoïste, que tu m’aimais bien et que quoi qu’il se passe après, tu continueras à penser à nous. Nous, on ne t’oubliera jamais. Ton image s’estompera bien sûr avec le temps, et ton sourire aussi… Mais il restera les photographies des moments passés avec toi, que l’on pourra regarder tout notre saoul quand on pensera que ton souvenir est trop loin dans notre mémoire. Et puis, tu as laissé un morceau de toi dans chacun de tes enfants… Pour moitié, ils sont toi, et pour l’autre moitié ils sont de Papi… Alors à part dans notre cœur, le plus beau souvenir que nous aurons de toi, c’est de regarder ces gens que tu as portés, que tu as façonnés à ton image pendant neuf mois, avant de les mettre au monde ( huit fois quand même, ce n’est pas rien), et de les élever le mieux possible. Ils sont toi, ils le resteront, je prendrais soin de l’un d’entre eux, c’est une promesse… Maintenant, tout comme pour mon père, j’aimerais te dire que j’aurais aimé que tu connaisses ton 18ème petit enfant (qui selon moi sera une fille, bien que je sois incapable de t’expliquer pourquoi)… Mais on ne choisit pas toujours comment les choses se déroulent. J’aurais encore tant d’autres choses à te dire, mais il est temps je crois, de trouver la force de te dire au revoir ma p’tite Maman. Tout comme les autres, il me faut te laisser partir. C’est comme ça. Je ne te demanderais qu’une seule chose, si jamais elle est possible : dis bonjour à mon père et dis-lui que je l’aime.
Je t’embrasse et si jamais il y a autre chose après, espère te revoir.
Noë
moustika- Date d'inscription : 08/04/2012
Age : 36
Localisation : sarthe
Re: Lettre à ma belle-Maman
très belle lettre empreinte de tristesse et d'amour à la fois.
condoléances.
condoléances.
Re: Lettre à ma belle-Maman
Je partage ta douleur en lisant cette belle lettre, qui est, je pense, un bel hommage ; et quelque chose me dit qu'au contraire, je crois que ta p'tite Maman lira cette lettre, et que lorsqu'elle sera à tes côtés, elle parviendra à trouver le moyen de te faire comprendre qu'elle va bien.
Mes sincères condoléances.
Mes sincères condoléances.
Marcus Edwin- Date d'inscription : 18/05/2012
Age : 34
Localisation : Dijon
Re: Lettre à ma belle-Maman
sincères condoléances.
Un hommage vibrant et triste qui témoigne du caractère certainement exceptionnel de cette personne.
Elle doit y être très sensible...
Un hommage vibrant et triste qui témoigne du caractère certainement exceptionnel de cette personne.
Elle doit y être très sensible...
Re: Lettre à ma belle-Maman
merci...
moustika- Date d'inscription : 08/04/2012
Age : 36
Localisation : sarthe
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