Un mal pour empêcher un mal bien plus grand?
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Un mal pour empêcher un mal bien plus grand?
Dans le texte "sensibilité" que j'ai posté en Août, je mettais en scène un ami que je désignais avec la lettre "R". Voici un autre extrait de mon journal qui parle de lui. Il a été rédigé en mai 2008. Comme vous l'avez vu, je n'écris pas de littérature. Je raconte ce qui me choque, ce qui me questionne, ce qui m'émeut... et peut-être qu'un jour je posterai des textes beaucoup plus intimes. J'hésite encore, car nous sommes à une époque où il est devenu beaucoup plus facile de parler de sexe que de spiritualité.
Donc, vous lirez ici des lignes assez anodines pour que les critiques ou l'indifférence ne me blessent pas, mais qui sont la trace d'une forte émotion passée.
"R. m'a prié de chercher sur internet des informations sur le tremblement de terre de lundi dernier en Chine. J'ai trouvé deux vidéos et des photos que nous avons regardées ensemble. C'est toujours un moment exceptionnel, que de se trouver à côté de lui quand il s'informe sur les événements du monde. R. voit ce que je ne vois pas, comprends ce que je ne comprends pas, et m'explique ce qui me semble, après-coup seulement, une évidence.
Il y avait par exemple une image poignante qui montrait une infirmière chinoise accroupie sur une petite dalle de béton, posée sans doute intentionnellement à cet endroit de la montagne de gravas que l'on devinait instables. Du matériel médical utilisé (seringue...) prouvait qu'elle venait de donner un soulagement à un homme encore jeune, aux trois-quarts enfoui sous les décombres et dont les traits tirés et le regard déchirant témoignaient de sa détresse. Je comprenais seulement que les secours s'organisaient. Mais R. a laissé éclater sa colère. Il a traité cette femme d'imbécile. Comme je ne comprenais pas, il m'a montré comment elle était chaussée. Elle portait des sandalettes qui ne lui donnaient aucune assise. Il m'a expliqué qu'au moins la moitié de son attention était tournée vers ses pieds qu'elle devait empêcher de glisser et que les efforts qu'elle déployait pour ne pas perdre l'équilibre la rendait incapable d'être en totalité présente à la victime dont la terrible souffrance muette nous atteignait jusque dans cette petite pièce tranquille.
Après que j'aie fait défiler quelques photos, j'ai tourné les yeux vers R. J'ai été douloureusement choquée par la transformation de son visage: il avait vieilli de dix ans. Son teint était devenu gris. Ses rides s'étaient creusées. Je ne l'ai pas détaillé davantage: la politesse et le respect m'ont retenue. Il m'a ensuite réclamé un comprimé pour l'estomac.
Il veut voir; il veut entendre; il veut savoir; et il est transpercé par chaque regard; par chaque scène; par chaque erreur, car elles lui sautent toutes aux yeux. Seuls les morts le laissent impassible: ils ne souffrent plus!
Nous avions vu au début du mois d'Avril la photo d'un défilé militaire chinois. Il avait reçu à travers elle beaucoup d'informations sur les hommes qui composent cette armée. Voici ce qu'il m'avait dit plus tard à ce sujet: "J'ai souhaité que ces soldats soient occupés à l'intérieur de leurs frontières et n'en sortent jamais. J'ai vu que s'ils en sortaient, ils aplatiraient tout sur leur passage. J'ai senti des vagues d'impatience qui provenaient d'eux arriver jusqu'à moi. Ces hommes se sont entraînés dur pendant des années. Ils sont prêts. Ils veulent utiliser leur savoir, montrer ce dont ils sont capables. Ils brûlent du désir de tuer. J'ai senti que les généraux chinois recevaient eux aussi ces vagues et qu'il leur suffirait de bien peu pour donner l'ordre à l'armée de se mettre en mouvement... Et il se passe ce que tu sais."
Donc, vous lirez ici des lignes assez anodines pour que les critiques ou l'indifférence ne me blessent pas, mais qui sont la trace d'une forte émotion passée.
"R. m'a prié de chercher sur internet des informations sur le tremblement de terre de lundi dernier en Chine. J'ai trouvé deux vidéos et des photos que nous avons regardées ensemble. C'est toujours un moment exceptionnel, que de se trouver à côté de lui quand il s'informe sur les événements du monde. R. voit ce que je ne vois pas, comprends ce que je ne comprends pas, et m'explique ce qui me semble, après-coup seulement, une évidence.
Il y avait par exemple une image poignante qui montrait une infirmière chinoise accroupie sur une petite dalle de béton, posée sans doute intentionnellement à cet endroit de la montagne de gravas que l'on devinait instables. Du matériel médical utilisé (seringue...) prouvait qu'elle venait de donner un soulagement à un homme encore jeune, aux trois-quarts enfoui sous les décombres et dont les traits tirés et le regard déchirant témoignaient de sa détresse. Je comprenais seulement que les secours s'organisaient. Mais R. a laissé éclater sa colère. Il a traité cette femme d'imbécile. Comme je ne comprenais pas, il m'a montré comment elle était chaussée. Elle portait des sandalettes qui ne lui donnaient aucune assise. Il m'a expliqué qu'au moins la moitié de son attention était tournée vers ses pieds qu'elle devait empêcher de glisser et que les efforts qu'elle déployait pour ne pas perdre l'équilibre la rendait incapable d'être en totalité présente à la victime dont la terrible souffrance muette nous atteignait jusque dans cette petite pièce tranquille.
Après que j'aie fait défiler quelques photos, j'ai tourné les yeux vers R. J'ai été douloureusement choquée par la transformation de son visage: il avait vieilli de dix ans. Son teint était devenu gris. Ses rides s'étaient creusées. Je ne l'ai pas détaillé davantage: la politesse et le respect m'ont retenue. Il m'a ensuite réclamé un comprimé pour l'estomac.
Il veut voir; il veut entendre; il veut savoir; et il est transpercé par chaque regard; par chaque scène; par chaque erreur, car elles lui sautent toutes aux yeux. Seuls les morts le laissent impassible: ils ne souffrent plus!
Nous avions vu au début du mois d'Avril la photo d'un défilé militaire chinois. Il avait reçu à travers elle beaucoup d'informations sur les hommes qui composent cette armée. Voici ce qu'il m'avait dit plus tard à ce sujet: "J'ai souhaité que ces soldats soient occupés à l'intérieur de leurs frontières et n'en sortent jamais. J'ai vu que s'ils en sortaient, ils aplatiraient tout sur leur passage. J'ai senti des vagues d'impatience qui provenaient d'eux arriver jusqu'à moi. Ces hommes se sont entraînés dur pendant des années. Ils sont prêts. Ils veulent utiliser leur savoir, montrer ce dont ils sont capables. Ils brûlent du désir de tuer. J'ai senti que les généraux chinois recevaient eux aussi ces vagues et qu'il leur suffirait de bien peu pour donner l'ordre à l'armée de se mettre en mouvement... Et il se passe ce que tu sais."
Dernière édition par Amiedetous le Sam 2 Fév - 12:38, édité 1 fois
Amiedetous- Date d'inscription : 28/06/2012
Re: Un mal pour empêcher un mal bien plus grand?
nous sommes à une époque où il est devenu beaucoup plus facile de parler de sexe que de spiritualité
C'est tellement vrai ! La spiritualité est devenue le tabou de notre époque. J'ai moi-même écrit dans l'un de mes textes qu'il est aujourd'hui plus choquant de se promener avec un missel à la main qu'avec un joint à la bouche. Je ne sais plus qui disait qu'on ne peut pas comprendre notre monde si l'on n'a pas à l'esprit qu'il s'agit d'un attentat perpétuel contre la spiritualité.
En ce qui concerne votre texte, il rend bien la différence de perception que l'on peut avoir d'un même événement, d'un même élément. C'est une question de culture, de formation personnelle. Et encore vous avez eu de la chance car vous avez été confrontée à une personne grâce à qui vous avez pu - en quelque sorte - ouvrir les yeux et percevoir la profondeur d'une image apparemment anodine. Il est des fois où les visions d'un même sujet sont divergentes et inconciliables, sans parler des images ou des vidéos manipulées dans un sens propagandiste.
Vous avez de la chance de côtoyer une personne qui vous permet de mieux comprendre les "choses du monde" et on ressent bien dans votre texte votre gratitude à son égard, et même un soupçon d'admiration.
Re: Un mal pour empêcher un mal bien plus grand?
Un grand merci pour avoir lu ce texte et écrit un commentaire. Avoir des lecteurs me donne envie de continuer d'écrire.
Oui, j'admire cet homme qui pourtant n'a aucun bagage: il sait tout juste lire et n'a aucune culture. Mais jamais je n'avais vu une telle intelligence.
Oui, j'admire cet homme qui pourtant n'a aucun bagage: il sait tout juste lire et n'a aucune culture. Mais jamais je n'avais vu une telle intelligence.
Amiedetous- Date d'inscription : 28/06/2012
Re: Un mal pour empêcher un mal bien plus grand?
c'est vrai que chacun voit sa réalité et que le partage permet une ouverture plus grande de l'esprit (ou de la vision des choses en général)
merci pour ce texte instructif
merci pour ce texte instructif
Re: Un mal pour empêcher un mal bien plus grand?
Merci pour l'avoir lu et laissé un petit mot.
Amiedetous- Date d'inscription : 28/06/2012
Re: Un mal pour empêcher un mal bien plus grand?
je t'en prie
je te trouve un lien tantot pour éditer ces pensées. tu comptes faire un recueil?
je te trouve un lien tantot pour éditer ces pensées. tu comptes faire un recueil?
Re: Un mal pour empêcher un mal bien plus grand?
A vrai dire, je tiens un journal, qui commence par un récit dont j'ai posté les deux premiers chapitres complets. Il s'agit d'une recherche que moi, j'appelle "spirituelle" à cause des mots que je choisis, mais que R. refuse toute spiritrualité. Il ne sait pas ce que c'est et rejette toute allusion à "dieu".
Pour faire un recueil de ces pensées, il me faudrait tout relire, et choisir, mais selon quels critères? Je manque énormément de recul. Je poste ici ce qui est passe-partout. De ce genre, je ne crois pas en avoir assez pour en faire un recueil.
J'ai rencontré cet homme que j'appelle un ami. Il a toutes les réponses à toutes les questions. Il vit ce que moi aussi je veux vivre. J'ai su qu'il saurait me conduire où je veux. Je me suis mise à son école. Il m'a demandé de noter ce que j'apprenais de lui et ce que je voyais de moi-même à mesure que je mûrissais. Je ne sais pas s'il existe des récits aussi détaillés d'un "voyage intérieur" qui va des premiers pas à l'aboutissement qui semble se rapprocher sans cesse. Il m'a dit qu'il avait su dès notre première rencontre que je "m'éveillerai". Eveillée ou sainte, je ne le suis pas encore. Mais chaque pas, dans la bonne direction ou dans l'erreur, chaque intuition, chaque retour en arrière, j'ai tout écrit. Ce sera la seule chose qui restera de lui quand il sera mort: le récit de ce qui se passe dans la vie de quelqu'un qui a trouvé son "gourou"; son "starets". Je mets ces mots entre guillemets parce qu'ils sont du domaine spirituel et que cet homme n'a rien d'un spirituel, et aussi parce qu'ils sont si galvaudés qu'ils en sont devenus ridicules. Même ce paragraphe me semble idiot à la relecture.
Si quelqu'un de très intéressé par la quête intérieure et d'assez informé sur les différentes traditions auxquelles je fais référence voulait bien lire tout ça et en extraire le plus significatif, ce serait merveilleux.
Ou bien tout cela pourrait être offert tel que, chapitre par chapitre, à raison d'un par semaine, par quinzaine... ce serait fantastique. Je ne veux ni être connue (je tiens à rester anonyme) ni faire de l'argent. Juste être lue par des gens que la soif de "Dieu" torture ou par des gens qui veulent approcher de très près un de ces êtres extraordinaires et rarissimes dont ils ont entendu parler, quelqu'un qui est né et est resté différent de nous.
Quand j'étais seule pour vivre cette recherche, que je ne pouvais m'aider que de livres, j'aurais été infiniment heureuse de trouver un journal de ce genre.
Ce que j'écris n'est pas vraiment de la littérature. C'est juste un témoignage au sujet duquel je certifie qu'il n'y a aucun mensonge et aucune embellie.
Pour faire un recueil de ces pensées, il me faudrait tout relire, et choisir, mais selon quels critères? Je manque énormément de recul. Je poste ici ce qui est passe-partout. De ce genre, je ne crois pas en avoir assez pour en faire un recueil.
J'ai rencontré cet homme que j'appelle un ami. Il a toutes les réponses à toutes les questions. Il vit ce que moi aussi je veux vivre. J'ai su qu'il saurait me conduire où je veux. Je me suis mise à son école. Il m'a demandé de noter ce que j'apprenais de lui et ce que je voyais de moi-même à mesure que je mûrissais. Je ne sais pas s'il existe des récits aussi détaillés d'un "voyage intérieur" qui va des premiers pas à l'aboutissement qui semble se rapprocher sans cesse. Il m'a dit qu'il avait su dès notre première rencontre que je "m'éveillerai". Eveillée ou sainte, je ne le suis pas encore. Mais chaque pas, dans la bonne direction ou dans l'erreur, chaque intuition, chaque retour en arrière, j'ai tout écrit. Ce sera la seule chose qui restera de lui quand il sera mort: le récit de ce qui se passe dans la vie de quelqu'un qui a trouvé son "gourou"; son "starets". Je mets ces mots entre guillemets parce qu'ils sont du domaine spirituel et que cet homme n'a rien d'un spirituel, et aussi parce qu'ils sont si galvaudés qu'ils en sont devenus ridicules. Même ce paragraphe me semble idiot à la relecture.
Si quelqu'un de très intéressé par la quête intérieure et d'assez informé sur les différentes traditions auxquelles je fais référence voulait bien lire tout ça et en extraire le plus significatif, ce serait merveilleux.
Ou bien tout cela pourrait être offert tel que, chapitre par chapitre, à raison d'un par semaine, par quinzaine... ce serait fantastique. Je ne veux ni être connue (je tiens à rester anonyme) ni faire de l'argent. Juste être lue par des gens que la soif de "Dieu" torture ou par des gens qui veulent approcher de très près un de ces êtres extraordinaires et rarissimes dont ils ont entendu parler, quelqu'un qui est né et est resté différent de nous.
Quand j'étais seule pour vivre cette recherche, que je ne pouvais m'aider que de livres, j'aurais été infiniment heureuse de trouver un journal de ce genre.
Ce que j'écris n'est pas vraiment de la littérature. C'est juste un témoignage au sujet duquel je certifie qu'il n'y a aucun mensonge et aucune embellie.
Amiedetous- Date d'inscription : 28/06/2012
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