Mon recueil de nouvelles "Arsouille mental(e)"
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19092011
Mon recueil de nouvelles "Arsouille mental(e)"
Bonjour à tous,
Eh bien voilà, un membre de plus à voir son livre publié.
Bon, pour l'instant le travail de publication est en cours, il va donc falloir patienter quelques semaines encore (enfin bon, si le coeur vous en dit, l'ouvrage est en précommande chez Kiro, ne vous gênez pas! ).
Bon, voici le lien: Arsouille Mental(e)
Et voici la couverture:
Il s'agit donc d'un recueil de nouvelles; le terme "nouvelles" en soi est peu approprié, car vu leur longueur, "novellas" conviendrait mieux mais, comme je pensais au départ qu'il s'agirait de textes plus courts, j'ai préféré garder cette appellation.
Cet ouvrage est donc un recueil de trois nouvelles qui ont pour point commun la moto.
J'ai été motard jusqu'au début de cette année, puis j'ai dû me résoudre à me séparer de ma belle pour des raisons de santé; je ne sais d'ailleurs pas à ce jour si je pourrais un jour en refaire. Ces nouvelles me tiennent donc particulièrement à coeur. Elles s'adressent au plus grand nombre. Nul besoin d'être initié au monde de la moto ou au vocabulaire motard pour les comprendre, comme vous pourrez vous en rendre compte en lisant les extraits un peu plus bas (mis en spoiler pour ne pas prendre trop de place).
La première s'intitule "Maurice", prénom qui est celui du personnage principal.
C'est un déchet, une épave. Le texte est très sombre et lorgne du côté du polar noir (dixit Kiro).
Extrait: (il s'agit ici du "vrai" début du texte)
Extrait:(petite précision:les réserves de pétrole sont épuisées, et les derniers litres d'essence au monde s'échangent à des prix astronomiques)
Le second texte lorgne du côté du polar. Il se compose de deux textes.
L'un est écrit à la troisième personne du singulier, en italique et quelques phrases sont distillées au début de chaque partie. On voit tout à travers les yeux du personnage, dont on ignore tout. Les pompiers s'affairent autour de son corps meurtri, entre deux voitures, et viennent de lui ôter son casque de moto.
L'autre texte, le principal, est raconté à la première personne par le narrateur donc. Depuis la tentative de bike-jacking dont il a été victime, et après la mort de son agresseur, il se rend compte qu'il éprouve du plaisir à tuer. Parallèlement à cela, il raconte son idylle avec Mathilde, sa concubine qui a changé sa vie. On le suit donc dans ses états d'âme et ses meurtres (qu'il commet au hasard sans aucune raison apparente), et sa vie sentimentale. Il erre, au guidon de sa moto, à la recherche de proies qu'il tue à chaque fois avec avidité à coups de U (antivol). C'est un texte tour à tour violent, parfois très dur, et à la limite du fleur bleu, pour mieux souligner la folie du personnage (enfin, c'est ce que j'ai essayé de faire ressortir ).
Extrait:(le narrateur vient de s'arrêter en plein forêt, sur une route à flanc de montagne, pour discuter avec un autre motard arrêté là suite à un souci; ce dernier décide alors de reprendre la route mais le narrateur vient de décider de le tuer. )
Voilà pour ce qui est de la présentation de mon ouvrage. Bon, d'accord, j'ai fait un peu long mais au moins le principal est dit.
Eh bien voilà, un membre de plus à voir son livre publié.
Bon, pour l'instant le travail de publication est en cours, il va donc falloir patienter quelques semaines encore (enfin bon, si le coeur vous en dit, l'ouvrage est en précommande chez Kiro, ne vous gênez pas! ).
Bon, voici le lien: Arsouille Mental(e)
Et voici la couverture:
Il s'agit donc d'un recueil de nouvelles; le terme "nouvelles" en soi est peu approprié, car vu leur longueur, "novellas" conviendrait mieux mais, comme je pensais au départ qu'il s'agirait de textes plus courts, j'ai préféré garder cette appellation.
Cet ouvrage est donc un recueil de trois nouvelles qui ont pour point commun la moto.
J'ai été motard jusqu'au début de cette année, puis j'ai dû me résoudre à me séparer de ma belle pour des raisons de santé; je ne sais d'ailleurs pas à ce jour si je pourrais un jour en refaire. Ces nouvelles me tiennent donc particulièrement à coeur. Elles s'adressent au plus grand nombre. Nul besoin d'être initié au monde de la moto ou au vocabulaire motard pour les comprendre, comme vous pourrez vous en rendre compte en lisant les extraits un peu plus bas (mis en spoiler pour ne pas prendre trop de place).
La première s'intitule "Maurice", prénom qui est celui du personnage principal.
C'est un déchet, une épave. Le texte est très sombre et lorgne du côté du polar noir (dixit Kiro).
Extrait: (il s'agit ici du "vrai" début du texte)
- Spoiler:
Assis derrière la vieille table de la cuisine, Maurice regarde la bouteille de vodka posée en plein milieu. Ses yeux rougis par l'alcool l'observent sans vraiment la voir. Tout ce qu'ils constatent est qu'elle est presque vide. Encore deux verres et elle ira rejoindre les autres dans la poubelle de la cour.
D'un geste machinal, il lève sa casquette de base-ball pour lisser les rares cheveux qu'il lui reste sur la tête. Plus d'une fois il a eu envie de se faire une boule à zéro pour ne plus les voir rebiquer quand il se fait face chaque matin dans le miroir piqué de la salle de bain. Mais à quoi bon s'en donner la peine alors qu'il ne se rase déjà que lorsque les poils de ses joues irritent sa peau à force de frotter contre le col de ses vêtements?
Il regarde sa montre. Encore une petite demi-heure à attendre.
Dehors, il fait certainement nuit noire. C’est une pure supposition vue l'heure. Les volets sont fermés et ne laissent rien filtrer. Dans des moments comme celui-ci, il a besoin d'être seul, de se sentir coupé du monde. De toute façon, il l'est depuis longtemps déjà. L'alcool est une aide formidable pour cela, un vrai ami sur lequel on peut compter les yeux fermés. Non seulement il vous isole, mais
en plus anesthésie vos souvenirs pour mieux les faire disparaître sous une épaisse couche de peinture poisseuse.
Depuis deux ans qu'il est à la retraite, il sombre. Enfin, un peu plus qu'avant. Le travail lui a toujours permis de garder la tête hors de l'eau. Quelle ironie. Désormais, il se sent comme un objet qui s'imbibe tout doucement et commence à s'enfoncer, résigné dans le fait qu'il n'y peut rien. Et que de toute façon il ne veut rien y faire.
L'assise de la chaise gémit lorsqu’il se penche pour attraper une assiette de charcuterie sur l'égouttoir de l'évier. Il grignote les tranches de saucisson plus qu'il ne les mange en les accompagnant d'un morceau de pain de la veille. Son estomac proteste à coups de brûlures. Maurice se contente de lâcher un rot comme pour les évacuer.
Nouveau coup d'œil à sa montre. A peine dix minutes se sont écoulées. Peu importe. Il chasse les miettes de sur sa bedaine, pose l'assiette et le verre dans l'évier avant d'aller jusqu'au garage.La nuit est bel et bien tombée. Les étoiles brillent, les grillons stridulent. De l'autre côté de la rue, une chauve-souris passe et repasse sans relâche dans la lumière d'un vieux lampadaire.Il traverse la cour encombrée de mauvaises herbes. Malgré ce qu'il a ingurgité, sa démarche est sûre. Question d'habitude. Le gravier crisse sous la semelle de ses bottes en caoutchouc coupées à hauteur de la cheville. Les ampoules nues qui pendouillent des petites appliques rouillées jettent un halo blafard.
En fait de garage, il s'agit plus d'un abri en planches branlant. Maurice l'a fabriqué de ses mains presque trente ans plus tôt, alors que lui et Lucie venaient juste de s'installer dans ce petit village. C'était son atelier, son petit jardin secret. Un espace rien qu'à lui, dédié à sa passion du bricolage et de la mécanique. Une époque où ses mains ne tremblaient pas encore à cause du manque d'alcool.
La vodka a été un aller-simple pour sa déchéance. Elle lui a tendu un bras amical et réconfortant pour mieux l'accaparer et l'isoler. La seule vie sociale qu'il a désormais est de passer pour le pilier de bar du village et d'être l'inépuisable sujet des ragots que se murmurent les commères lorsqu'il traverse la place. Elles ne comprennent pas comment un homme peut descendre aussi bas. Elles sont d'accord pour expliquer à qui veut l'entendre qu'elles auraient agi autrement, que lorsqu' on perd l'être aimé à son âge, il faut relever la tête,
faire face et se construire une nouvelle vie. Surtout quand on a un enfant. Si c'est pas triste de voir un si bel homme avec une telle situation se laisser aller. A quarante ans, la vie ne fait que commencer. C'est ce qu'elles disent, et ce qu'elles auraient fait, elles le savent.
Maurice, lui, n'a pas survécu. Il s'est échoué quand Lucie s'en est allée.- Spoiler:
- Il traverse le salon en direction de la cour. En passant devant le guéridon du téléphone, il s'arrête pour regarder un petit cadre photo. Lucie sourit en gros plan. Elle tient contre elle Damien, leur enfant qui brandit fièrement les dix bougies de son anniversaire. Maurice caresse le cadre, puis il le bascule délicatement pour cacher la photo. Sa gorge s'est nouée. Il chasse son émotion en reniflant.
Dans la cour, seul un des deux pots crachote encore un peu de fumée blanche en rythme avec le bruit du moteur. Maurice s'installe aux commandes. Les suspensions s'affaissent légèrement. Au crissement des mousses du casque contre sa barbe naissante, il constate qu'elles se sont desséchées avec le temps. Elles s'émiettent par petites plaques qui se collent à la sueur de son cou. Ce n'est pas grave. Ce casque n'est pas là pour le protéger. Son blouson non plus d'ailleurs. Les stigmates de chute qu'ils portent l'un et l'autre ne laissent planer aucun doute là-dessus. Si Maurice les a enfilés ce soir, ce n'est ni pour les coordonner avec le côté rétro de la moto ni parce qu'il n'en a pas d'autres.
Non, s'il a fait ce choix, c'est pour ne pas oublier et trouver la force en lui quand le moment sera venu.
La boîte de vitesse claque quand il passe la première. Tout en gardant les pieds au sol, il remonte la longue allée gravillonnée en jouant avec l'embrayage. Le portail est grand ouvert. Cela fait longtemps qu'il ne le ferme plus. Qui viendrait cambrioler le taudis dans lequel il vit? Même les gamins ont arrêté depuis belle lurette de jeter des cailloux en pleine nuit sur les plaques de tôle ondulée qui servent de toit au garage.
Alors que ses yeux regardent à gauche et à droite pour être sûr que personne n'arrive même au loin, ils tombent sur la masse sombre et imposante du clocher qui se dresse dans le ciel nocturne au bout de la rue. Un projecteur pointé droit vers le ciel en éclaire l'horloge du côté de la place du village. Maurice a un sourire amer. Ce qu'il va commettre est sans aucun doute le pêcher ultime mais ce n'est
pas grave. Cela fait longtemps que lui et Dieu ne se parlent plus. Maurice n'a rien à lui dire, et de toute façon, Dieu ne lui a jamais répondu. C'est aussi bien comme ça.
Tandis qu'il se cale le plus confortablement possible sur la selle, il sent la crosse du petit automatique contre ses lombaires.
« Allez, en avant » murmure-t-il à sa propre intention sans aucune conviction.
Les deux autres textes du recueil ont des thèmes bien différent.
Le premier se passe à la fin de ce siècle dans une France hyper-sécurisée, parfois jusqu'à l'absurde, dont la vie des citoyens est régie par la Loi de protection de la Vie dont le fondement même, gravé au fronton de chaque salle de cours d'éducation civique, tient en une phrase: "Quand la raison défaille, des mesures doivent être prises pour la suppléer".
Le résumé: Quentin, étudiant en commerce international, ne se pose jamais aucune question sur sa vie car pour lui, tout est déjà tracé: ses études, son futur travail (directeur dans une succursale de l'entreprise de son père), sa vie amoureuse (qu'il refuse de débuter pour se concentrer exclusivement sur sa réussite), et même son quotidien, qui est régi par le Major d'Home, le programme informatique de son appartement qui répond à ses moindres besoins.
Lors d'une visite dans un musée, il passe devant quatre étranges machines, des "motocyclettes". Désormais interdites depuis plusieurs décennies car jugées trop dangereuses, ces "aberrations mécaniques" le fascinent tout de suite, car il se demande ce qui a bien pu pousser un jour des êtres humains à vouloir monter là-dessus malgré les risques encourus. Bien involontairement, il va faire la connaissance de Valentin Ross, un vieil homme, ancien passionné de moto, en phase terminale de cancer, dont le rêve est, comme vous le devinez, de remonter sur un des ces machines pour partir faire une ultime virée. Quentin va alors se mettre à cogiter sur son existence, sur cette Loi de Protection de la Vie, et de doutes en doutes, il va finir par aider Valentin à réaliser son souhait. Il ne se doute pas, bien évidemment, qu'il va alors mettre les doigts dans un terrible engrenage.
Le premier se passe à la fin de ce siècle dans une France hyper-sécurisée, parfois jusqu'à l'absurde, dont la vie des citoyens est régie par la Loi de protection de la Vie dont le fondement même, gravé au fronton de chaque salle de cours d'éducation civique, tient en une phrase: "Quand la raison défaille, des mesures doivent être prises pour la suppléer".
Le résumé: Quentin, étudiant en commerce international, ne se pose jamais aucune question sur sa vie car pour lui, tout est déjà tracé: ses études, son futur travail (directeur dans une succursale de l'entreprise de son père), sa vie amoureuse (qu'il refuse de débuter pour se concentrer exclusivement sur sa réussite), et même son quotidien, qui est régi par le Major d'Home, le programme informatique de son appartement qui répond à ses moindres besoins.
Lors d'une visite dans un musée, il passe devant quatre étranges machines, des "motocyclettes". Désormais interdites depuis plusieurs décennies car jugées trop dangereuses, ces "aberrations mécaniques" le fascinent tout de suite, car il se demande ce qui a bien pu pousser un jour des êtres humains à vouloir monter là-dessus malgré les risques encourus. Bien involontairement, il va faire la connaissance de Valentin Ross, un vieil homme, ancien passionné de moto, en phase terminale de cancer, dont le rêve est, comme vous le devinez, de remonter sur un des ces machines pour partir faire une ultime virée. Quentin va alors se mettre à cogiter sur son existence, sur cette Loi de Protection de la Vie, et de doutes en doutes, il va finir par aider Valentin à réaliser son souhait. Il ne se doute pas, bien évidemment, qu'il va alors mettre les doigts dans un terrible engrenage.
Extrait:(petite précision:les réserves de pétrole sont épuisées, et les derniers litres d'essence au monde s'échangent à des prix astronomiques)
- Spoiler:
Comme Quentin acquiesce, il (Valentin) continue:
« Donc voilà: si je vous en donne l’occasion, voudriez-vous la voir? Je veux dire: la voir rouler. Ma vie touche à sa fin, Quentin, et c’est un rêve que je me suis juré de réaliser. La démarrer et la faire rouler. Si je ne le fais pas maintenant, je ne pourrais plus jamais le faire. Et de toute façon, que m’importe désormais d’être dénoncé?»
Il baisse les yeux, soudain timide.
« Je n’ai jamais eu de femme ni d’enfant, trop occupé que j’étais à me salir les mains dans le cambouis. Mais je vous ai vu au musée, Quentin. J'ai vu l'étincelle dans vos yeux. Vous êtes la seule personne que je connais avec qui partager ce rêve.»
Une éternité s’écoule entre les deux hommes. Quentin a tourné son visage vers la lumière du soleil, les paupières closes, perdu dans ses réflexions. Valentin n’ose pas le regarder. C'est cependant Quentin qui finit par rompre le silence. Il baisse la tête et ouvre les yeux avec peine à cause de la luminosité.
« Pourquoi faisaient-ils cela, monsieur Ross? Pourquoi montaient-ils sur ces machines si dangereuses? La vie à cette époque n’avait-elle donc aucune valeur?»
Valentin le regarde, partagé entre tristesse et espoir.
« Elles n’étaient pas dangereuses. Enfin, pas autant qu’on a voulu nous le faire croire, loin de là. Comme tout véhicule, elles étaient impliquées dans des accidents et oui, le pilote n’avait pas de carrosserie pour le protéger, alors il était souvent blessé. Certains mouraient lors de ces accidents.
- Alors pourquoi ?
- Pour vivre, Quentin, pour vivre. Ou plutôt pour se sentir vivre. Pouvez-vous imaginer le sentiment de liberté qu’on éprouve au guidon de ces engins? Vous, cette machine et la route qui défile, le moteur qui ronronne, les paysages qui s’enchaînent, l’air frais sur le visage. Nul besoin d’aller vite ou de prendre des risques. La liberté, Quentin, la liberté.»
Il sort de la poche de son veston un objet qui ressemble à une carte de visite et la glisse dans la main de l'étudiant.
« Voici mon numéro de téléphone. Si le cœur vous en dit, je serai chez moi demain, à ma maison de campagne. Et demain sera le grand jour. Cela fait plusieurs années que je réussis à conserver quelques litres de carburant. Ils valent une fortune, je sais, mais demain, je les verserai dans le réservoir et…»
Il laisse sa phrase en suspens pour suivre du regard un groupe d'hirondelles qui virevoltent au-dessus du parc, décrivant de larges courbes qui s’entrecroisent.
« La liberté, Quentin… » murmure-t-il.
Il se lève et fait quelques pas avant de se retourner.
«Vous y penserez ce soir en rentrant chez vous.»
Le second texte lorgne du côté du polar. Il se compose de deux textes.
L'un est écrit à la troisième personne du singulier, en italique et quelques phrases sont distillées au début de chaque partie. On voit tout à travers les yeux du personnage, dont on ignore tout. Les pompiers s'affairent autour de son corps meurtri, entre deux voitures, et viennent de lui ôter son casque de moto.
L'autre texte, le principal, est raconté à la première personne par le narrateur donc. Depuis la tentative de bike-jacking dont il a été victime, et après la mort de son agresseur, il se rend compte qu'il éprouve du plaisir à tuer. Parallèlement à cela, il raconte son idylle avec Mathilde, sa concubine qui a changé sa vie. On le suit donc dans ses états d'âme et ses meurtres (qu'il commet au hasard sans aucune raison apparente), et sa vie sentimentale. Il erre, au guidon de sa moto, à la recherche de proies qu'il tue à chaque fois avec avidité à coups de U (antivol). C'est un texte tour à tour violent, parfois très dur, et à la limite du fleur bleu, pour mieux souligner la folie du personnage (enfin, c'est ce que j'ai essayé de faire ressortir ).
Extrait:(le narrateur vient de s'arrêter en plein forêt, sur une route à flanc de montagne, pour discuter avec un autre motard arrêté là suite à un souci; ce dernier décide alors de reprendre la route mais le narrateur vient de décider de le tuer. )
- Spoiler:
- J'ai marché avec lui jusqu'à sa moto. Il est monté dessus et, pile au moment où il la redressait, j'ai poussé aussi fort que j'ai pu avec mon pied. Je vois encore ses bras battre l'air à la recherche de quelque chose à quoi s'agripper, puis il a basculé dans les buissons desséchés et a disparu de ma vue, entraîné en contrebas par sa moto. J'ai entendu des branches casser et quelques cailloux rouler, la végétation griffer les carénages. Un peu de poussière est même remontée jusqu'au bord de la route. J'ai attendu quelques secondes avant de m'approcher du bord.
Le gars avait dégringolé sur cinq ou six mètres avant qu'un arbre l'arrête. Vu d'ici, il ressemblait à n'importe qui faisant la sieste adossé à un tronc, le menton reposant sur la poitrine. Sauf que la moto lui écrasait la jambe droite et qu'il était habillé en motard avec son casque.
J'ai d'abord cru qu'il était assommé. Je crois que j'ai prié pour qu'il ne soit pas mort. C'est avec satisfaction que j'ai vu le casque bouger, puis les bras, et il a marmonné quelque chose. Il a fini par lever la tête vers moi. La visière à demi déboitée de son casque se balançait mollement. Il m'a supplié de l'aider, d'appeler les secours. Ses paroles étaient étouffées mais, au ton de sa voix, j'ai deviné qu'il souffrait et luttait pour ne pas être terrassé par la douleur. Il m'appelait sans cesse.
Je me suis toujours demandé, et je continue d'ailleurs, s'il avait vraiment conscience que c'est moi qui venait de le précipiter là où il se trouvait et que, par conséquent, je n'avais aucune envie de l'aider à en sortir. Il a alors commencé à parler plus fort, puis à hurler.
(...)
Je suis descendu juste à côté du gars. L'odeur de l'essence qui fuyait m'a chatouillé les narines. Le type ne m'a pas remarqué, ou n'a pas voulu, je l'ignore. Sans doute commençait-il à comprendre qu'il allait crever là par cette belle soirée ensoleillée. Au moins mourrait-il au frais. Bien maigre consolation me direz-vous.
Il n'avait pas enlevé son casque et pianotait nerveusement sur son portable. Ce n'est qu'une heure plus tard, alors que je grignotais un hamburger au Mc Do du coin, que j'ai compris qu'en fait il ne devait pas y avoir de couverture à cet endroit. Toujours est-il que le gars s'acharnait avec ses doigts et il a fini par lever son téléphone vers le ciel comme pour le relier à une antenne invisible ou appeler Dieu, allez savoir. Les gens ont des réactions curieuses dans des moments comme celui-là.
(...)
(...)j'ai bien calculé mon coup et, après m'être agrippé à des branches, j'ai lancé mon pied à hauteur de son oreille comme pour enfoncer une porte.
J'ai crû que sa tête s'arrachait de ses épaules mais elle a entraîné tout le torse et le type a basculé sur le côté de l'arbre. Sa jambe coincée sous la moto l'a empêché de glisser plus bas dans la pente.
De nouveau, je me suis demandé s'il je ne l'avais pas tué. Quel dommage ça aurait été. J'ai attendu je ne sais combien de temps. Pas plus d'une minute je pense. Soit le type feintait et faisait le mort comme certaines proies, soit il était vraiment sonné et a fini par revenir à lui sans trop savoir où il était. Toujours est-il que je l'ai soudain entendu respirer bruyamment au bout d'un long moment et que sa main blessée s'est mise à palper le sol. J’en ai été soulagé.
Je me suis redressé, l'oreille aux aguets. Pas un bruit ne troublait le silence de la forêt. Pas de vent dans les arbres, pas d'oiseaux, pas de moteur de voiture ou de moto approchant. Je me suis alors penché sur le type. Je le voyais de profil. La visière avait sauté pour de bon et j'apercevais son œil gauche. Il regardait fixement devant lui, la paupière battant de manière saccadée. Je devinais d'imperceptibles mouvements de sa pupille et j'ai compris que le gars devait me sentir à la limite de son champ de vision. Il était déchiré entre sa volonté de regarder le monstre qui le surplombait et la peur de le voir.
Il n'y avait plus aucun doute dans son esprit par contre. Il savait qu'il allait mourir ici. Je l'ai vu dans ce regard fuyant.
(...)
Je me souviens que je lui ai tapoté l'épaule comme à un camarade à qui l'on veut dire que tout va bien se passer, que ce n'est rien ce qui lui arrive. A la manière d'un maquignon caressant la croupe d'une vache qu'il envoie à l'abattoir aussi. Puis je me suis redressé. Sa respiration s'est accélérée, se faisant plus rauque.
Agonisait-il? Attendait-il le coup de grâce? J'ai pris une profonde inspiration pour me concentrer. Finalement, j'ai levé le U au-dessus de ma tête comme s'il s'agissait d'une hache et que je m'apprêtais à fendre du bois, puis d'un mouvement précis, je l'ai abaissé de toutes mes forces sur son coude.
Malgré la chaleur, le type portait une combinaison de cuir avec de bonnes protections. Je l'ai à peine entendu gémir. J'ai repris position et j'ai frappé à nouveau. Je me suis acharné, encore et encore. Sur les articulations d'abord, pour qu'il ne puisse pas se débattre. Les coutures au niveau des protections ont fini par céder et au bout d'un moment le cuir lui-même s'est déchiré.
J'ai continué. Je ne sais pas combien de fois j'ai abaissé ainsi le U, puis relevé, puis abaissé à nouveau. A chaque coup, le métal entrait un peu plus profondément. J'entends toujours son bruit mat contre le cuir et la mousse des protections puis contre la chair.
Tchomp! tchomp! tchomp!
Le type s'est pour ainsi dire laisser faire. Le fait qu'il ne crie pas ne m'a même pas étonné.
Il y a quelques jours seulement que j'ai appris que mon coup de pied a été si violent que je lui ai écrasé la trachée ou quelque chose comme ça. Mon pied a certainement glissé sous sa mentonnière. Non seulement respirer était un véritable calvaire pour lui mais en plus il ne pouvait même pas extérioriser sa peur et sa douleur. J'ai longtemps pensé qu'il était mort en brave, en regardant la Faucheuse droit dans les yeux et en serrant les dents. Même pas. S'il avait pu, il aurait hurlé comme un cochon qu'on égorge. Un lâche. Heureusement qu'il ne l'a pas fait, j'aurais été forcé d'abréger. Mais comme il ne disait rien, j'ai continué. Pendant un bon moment.
Après les articulations, je me suis attaqué au reste.
Tchomp! Tchomp! Tchomp!
L'entrejambe, le ventre, les côtes, les membres.
Tchomp! Tchomp! Tchomp!
Mais pas la tête.
(...)
Quant au type que j'ai tué, il s'appelait Michel, avait quarante-neuf ans, était marié et père de trois enfants. Il habitait un hameau tout proche, de l'autre côté de la colline.
Cela, il ne me l'a pas dit quand on a discuté. Je l'ai appris le surlendemain en lisant le journal. Le corps a été découvert par un bambin de six ans qui se baladait avec sa mère le mercredi après-midi.
De mon côté, cela ne m'a rien fait de voir la première page du quotidien régional relaté ce meurtre. Aucune satisfaction, aucun malaise ni aucune crainte d'être découvert. En tant que prédateur, j’avais fait ce qu'il fallait pour subvenir à mes besoins naturels. Cela m'a simplement ouvert l'appétit et je me suis senti pousser des crocs.
**********
Voilà pour ce qui est de la présentation de mon ouvrage. Bon, d'accord, j'ai fait un peu long mais au moins le principal est dit.
Dernière édition par Demi-Tour le Mar 4 Oct - 18:44, édité 6 fois
Demi-Tour- Date d'inscription : 13/09/2011
Age : 51
Mon recueil de nouvelles "Arsouille mental(e)" :: Commentaires
Margaux1999 a écrit:je comprend pas pourquoi c'est marquer
Spoiler
Le "spoiler" te permet d'intégrer une partie qui n'est visible que si le lecteur veut la voir, et donc de gagner de la place. Il te suffit de cliquer dessus pour l'ouvrir.
envoie moi le lien via mp demi-tour. ou bien juste le titre de ce recueil ou bien le lien tout écrit avec tu vois quoi? www shclass shclass deux points (titre) arobase....
comme ça quoi et je retrouverai
j'irai lire demain (là crise d'autorité sur enfants oblige, c'est l'heure)
comme ça quoi et je retrouverai
j'irai lire demain (là crise d'autorité sur enfants oblige, c'est l'heure)
extialis a écrit:envoie moi le lien via mp demi-tour. ou bien juste le titre de ce recueil ou bien le lien tout écrit avec tu vois quoi? www shclass shclass deux points (titre) arobase....
comme ça quoi et je retrouverai
j'irai lire demain (là crise d'autorité sur enfants oblige, c'est l'heure)
J'ai rien compris
je veux dire : si tu ne peux poster de lien, tu me l'envoie comme je te l'ai dit ci dessus et je fais le "calcul", (je trouve le lien comme ça, le recompose et le poste ici. capishe?
Oki!!!
Mais je crois que dès demain, je vais pourvoir...
Je vais donc essayer, comme ça je saurai si oui ou on je peux poster des liens (bon, c'est pas que je vais en poser tous les jours non plus ).
Mais je crois que dès demain, je vais pourvoir...
Je vais donc essayer, comme ça je saurai si oui ou on je peux poster des liens (bon, c'est pas que je vais en poser tous les jours non plus ).
Lien rajouté à la présentation de l'ouvrage (1er message donc)
Oups, quelle quiche, je viens de m'apercevoir que la présentation de mon recueil ,était incomplète, puisque je ne parlais que du premier texte
Du coup, je viens de rectifier le tir... Donc re-bonne lecture à vous!
Du coup, je viens de rectifier le tir... Donc re-bonne lecture à vous!
sur le troisième spoiler, deux coquilles, mais dans l'ensemble... trop bien, trop dur tes textes... mes aïeux! où vas tu chercher tout ça? (rudement bien écrit, bravo en tout cas)
Exta --> ce sont les versions brutes de fonderie, si je puis dire . Faut bien que je laisse un peu de travail à ma DO
Sinon, pour le dernier spoiler, c'est le meurtre le plus doux!
Sinon, pour le dernier spoiler, c'est le meurtre le plus doux!
crénom! ça promet. t'es le fils de thilliez ou quoi?
Des amis, qui ont été les premiers lecteurs de ces textes (et qui m'ont donc conseillé de les envoyer à des éditeurs) ont été vraiment troublés par celui-ci, car ils ne comprenaient pas comment je pouvais avoir de telles idées, surtout qu'elles ne correspondent pas à ma personnalité.
Je n'ai pas su quoi leur répondre, d'autant plus que ce texte, je l'ai écrit parce que j'avais une phrase qui me trottait dans la tête depuis quelques temps, et que je ne savais pas du tout où cela pouvait me mener. A l'instinct, donc...
La phrase, c'était: "Mon premier homme, je l'ai tué cela fait... pfff, huit mois."
Et voilà. J'en ai pondu plus de 70 pages!
Je n'ai pas su quoi leur répondre, d'autant plus que ce texte, je l'ai écrit parce que j'avais une phrase qui me trottait dans la tête depuis quelques temps, et que je ne savais pas du tout où cela pouvait me mener. A l'instinct, donc...
La phrase, c'était: "Mon premier homme, je l'ai tué cela fait... pfff, huit mois."
Et voilà. J'en ai pondu plus de 70 pages!
hé bé! mais (question) entre le premier jet et la présentation (à tes potes ou autres, peu importe) de ton texte, combien de temps les laisses tu mariner et se laisser corriger par ta pomme? (question peut-être stupide, mais ça m'intrigue, excuse moi si je suis indiscrète, t'es pas obligé de répondre, bien sûr )
Pour être honnête, je ne me rappelle plus.
Quand l'inspiration vient, il faut que j'écrive, vite, tout de suite.
La deuxième nouvelle, celle d'anticipation, je l'ai écrite pour ainsi dire en deux nuits et trois jours. J'ai eu l'idée en me levant un beau matin, et je me suis posé devant mon pc en rentrant du travail.
Les textes, tels que je les ai envoyés, et donc tels qu'ils sont en extrait, sont très peu différents de la version "brute de fonderie".
En général, j'écris, et parfois cela est long car au fur et à mesure que l'écriture avance, je sens ce qui cloche à mes yeux et, pour ainsi dire, je fais des corrections tout de suite.
Après avoir posé le point final, je fais une première relecture, pendant laquelle je remarque le plus souvent les fautes assez grossières: orthographe,grammaire, mais surtout les répétitions, les tournures maladroites, les parties "pas terribles" ou qui manque de clarté.
Et puis, une fois cette première correction achevée, je n'essaie de ne plus penser au texte. Je ne le reprends que quand l'envie, justement, me reprend, ou quand j'y pense. A ce moment-là, j'en profite pour "élaguer" car je me rends compte de toutes les lourdeurs et des détails inutiles.
Et puis je fais cela plusieurs fois, mais ne me demande pas en combien de temps. Sache juste qu'en général, tout est plié en une quinzaine de jours (mais pour le texte Amertume, présent sur le forum, comme pour la nouvelle "Maurice", cela n'a même pas pris une semaine, et Maurice est pour ainsi dire la version "originale" à quelques mots près).
Je ne réécris jamais un texte; les retouches que je fais ne concernent que des tournures (qui concernent parfois deux ou trois phrases, il est vrai), des fautes, etc, et quand je parle de laisser mûrir mes textes, c'est une expression que j'emploie pour dire que, des fois, lors d'une nouvelle lecture, je trouve que tel ou tel mot irait mieux à la place de celui employé.
En spoiler, voici la version brute de fonderie de Amertume, après ma fameuse première relecture; la version finale se trouve sur le forum, je te laisse chercher les différences, tu verras qu'elles ne sont pas légion...
Quand l'inspiration vient, il faut que j'écrive, vite, tout de suite.
La deuxième nouvelle, celle d'anticipation, je l'ai écrite pour ainsi dire en deux nuits et trois jours. J'ai eu l'idée en me levant un beau matin, et je me suis posé devant mon pc en rentrant du travail.
Les textes, tels que je les ai envoyés, et donc tels qu'ils sont en extrait, sont très peu différents de la version "brute de fonderie".
En général, j'écris, et parfois cela est long car au fur et à mesure que l'écriture avance, je sens ce qui cloche à mes yeux et, pour ainsi dire, je fais des corrections tout de suite.
Après avoir posé le point final, je fais une première relecture, pendant laquelle je remarque le plus souvent les fautes assez grossières: orthographe,grammaire, mais surtout les répétitions, les tournures maladroites, les parties "pas terribles" ou qui manque de clarté.
Et puis, une fois cette première correction achevée, je n'essaie de ne plus penser au texte. Je ne le reprends que quand l'envie, justement, me reprend, ou quand j'y pense. A ce moment-là, j'en profite pour "élaguer" car je me rends compte de toutes les lourdeurs et des détails inutiles.
Et puis je fais cela plusieurs fois, mais ne me demande pas en combien de temps. Sache juste qu'en général, tout est plié en une quinzaine de jours (mais pour le texte Amertume, présent sur le forum, comme pour la nouvelle "Maurice", cela n'a même pas pris une semaine, et Maurice est pour ainsi dire la version "originale" à quelques mots près).
Je ne réécris jamais un texte; les retouches que je fais ne concernent que des tournures (qui concernent parfois deux ou trois phrases, il est vrai), des fautes, etc, et quand je parle de laisser mûrir mes textes, c'est une expression que j'emploie pour dire que, des fois, lors d'une nouvelle lecture, je trouve que tel ou tel mot irait mieux à la place de celui employé.
En spoiler, voici la version brute de fonderie de Amertume, après ma fameuse première relecture; la version finale se trouve sur le forum, je te laisse chercher les différences, tu verras qu'elles ne sont pas légion...
- Spoiler:
- Je cours.
Suis à bout de souffle.
Les poumons en feu.
Je voudrais me redresser pour mieux m'oxygéner, mais je ne peux pas. L'air me manque, mes jambes vont et viennent dans un rythme mécanique, inconscient.
Deux minutes que le bip accroché à ma ceinture a sonné alors que je tondais le gazon.
Deux minutes que je me suis lancé dans un sprint effréné à travers le village jusqu'à la caserne.
Deux minutes que le soleil de plomb de cette chaude journée de juillet m'écrase, embrase l'air qui me sèche la gorge et me brûle les bronches.
Deux minutes qu'une soudaine montée d'adrénaline à court-circuité mon cerveau.
Deux minutes que la semelle des vieux mocassins, que je ne mets plus que pour bricoler tellement ils sont usés, claque sur le bitume. Pas vraiment l'idéal pour courir. Mais pas le temps de me changer, d'essuyer les brins de gazon collés par la sueur à mes tibias, de m'échauffer, de même me laver les mains. Plus tard, je verrai. Mais pas maintenant, non. La seule chose qui compte c'est d'arriver au plus vite.
J'ahane. J'étouffe.
Enfin, là, au détour d'une rue, la caserne. Je m'y engouffre à toute vitesse pour attraper le micro et répondre à l'appel. Au dehors, j'entends une moteur de voiture ronfler, le couinement caractéristique d'un frein de vélo mal entretenu qu'on torture soudain, des pas précipités. Et les collègues déboulent dans le couloir alors que je note le message sur la feuille d'intervention.
Une personne est tombée du haut d'un arbre. Coup classique en cette période de récolte des fruits. Elle est inconsciente. Dragon est au départ. C’est l'hélicoptère de la Sécurité Civile.
Je fonce au vestiaire pour prendre mon uniforme. Je me changerai en route, car il n'y a pas de temps à perdre. Le VSAB est déjà prêt à partir. Nous ne sommes que trois cet après-midi, alors inutile de traîner. Là aussi, il faut courir, se dépêcher. Encore. Toujours plus vite sans céder à la panique ni aux maladresses de la précipitation. Etre professionnel, simplement.Non, ne pas paniquer. Jamais.
Je m'habille tant bien que mal. Sur les routes tortueuses de la région, garder l'équilibre pour enfiler un pantalon dans un véhicule qui roule le plus vite possible n'est pas une gageure mais une utopie.
J'ai tout juste le temps de finir et de vérifier le matériel que, déjà, le VSAB s'arrête en faisant crisser les gravillons du bas-côté de la route. Mon équipement sur le dos, j'enfonce pour ainsi dire la double-porte arrière.
La victime est là, de l'autre côté du fossé, allongée comme si elle faisait la sieste à l'ombre de ce cerisier duquel elle a chuté. Du sang
marbre son visage et ses bras nus. Les quelques cueilleurs présents s'écartent pour nous faire de la place. Un étrange soulagement se dessine sur leurs visages anxieux.
Je m'agenouille à côté de la victime. C'est un homme. Il a le physique trapu et le visage résigné des personnes habituées à courber l'échine sous le poids de la vie. Entre sa barbe naissante, ses profondes rides encrassées et sa peau burinée par le soleil et le vent, je n'arrive pas à déterminer son âge. Cinquante, soixante ans? Peut-être plus, mais une partie de moi espère que ce n'est pas moins. Ses vêtements sont des haillons. Il les a mis pour travailler mais, sans que je puisse dire pourquoi, je pressens qu'ils sont portés bien plus souvent. Tous les jours en fait. Peut-être est-ce à cause de l'usure, ou bien des tâches si vieilles qu'elles se sont fondues avec la couleur du tissu.
C'est dingue ce que le cerveau peut remarquer dans un moment comme celui-ci. C'est peut-être une soupape, après tout, qui lâche un peu de vapeur pour lui permettre de réagir de manière plus sereine.
J'ai soudain envie de rire . Je me suis fait avoir comme un bleu, mais la ressemblance était trop frappante. L'homme cueillait des cerises, et le sang sur son visage et ses bras n'est autre que du jus mélangé à la pulpe des fruits écrasés. Il n’a aucune plaie visible. Alors que je lui prends la main pour le stimuler, il ouvre les yeux et me fixe, puis son regard parcourt les environs avant de revenir se visser dans le mien.
« Vous m'entendez? » dis-je par pur réflexe.
Il acquiesce faiblement.
« J'ai fait un malaise, annonce-t-il d'un ton calme comme s'il m'expliquait qu'il revient de la pêche. Mais ça va aller, j'ai l'habitude, j'en fais souvent. »
J'ai envie de lui dire qu'il ne doit pas s’agir d'un simple malaise et qu'il a fait une chute de plus de quatre mètres de haut. Alors je lui parle, lui demande des renseignements pour juger de son état, et à ses réponses se mêle la discussion entre mon chef et le propriétaire du verger. Quelques mots attirent mon attention sans que je le veuille. «Sdf», «saisonnier», «déclaré donc pas de souci». Il s'appelle Roger. C'est un habitué, il vient chaque été ramasser les fruits. Il va de ferme en ferme à la recherche de travail. Chaque détail entre en résonnance avec les remarques que je me suis fait à mon arrivée à propos de ses vêtements usés jusqu'à la corde et son visage trop abîmé pour son âge.
Je transmets le bilan au chef avant de m'occuper à nouveau de la victime. Car c'est ce qu'il est à cet instant, un être blessé dans sa chair et peut-être même dans sa tête, mais je ne peux m'occuper que de son physique.
Il grimace alors que la minerve lui enserre le cou, puis quand la planche glisse sous lui pour le maintenir bien droit. Le masque à oxygène l'énerve. Il le repousse d'un geste agacé.
« Je vais bien, fait-il, toujours aussi calme. Ne vous inquiétez pas, ce n'est pas la peine de... »
Il cherche ses mots. Bien que gêné par la minerve, il cherche à tourner la tête pour parcourir des yeux les environs. Il aperçoit une
demi-douzaine de pompiers venus en renfort d'une autre caserne s'affairer un peu plus loin, dans un champ.
«... De faire tout ça pour moi, » finit-il par dire. Je ne comprends pas vraiment ce que cela signifie. Ou plutôt, je ne saisis pas le sens profond de ses mots car, à cet instant, je ne réalise pas encore. Il n'est pas rare qu'une victime ne se rende pas compte de son état ou bien juge disproportionnés toutes les mesures prises et les moyens engagés pour lui porter secours. Mais aujourd'hui, ce n'est pas le cas, et je vais le découvrir dans quelques instants, sans que je me doute de quoi que ce soit, sans que je m'attende à prendre une telle leçon de vie, là, dans ce verger, agenouillé auprès d’une victime par une chaude journée.
« Ne dites pas ça, vous allez faire un tour en hélicoptère en plus!
- Comment ça?
- Eh bien, vous allez être évacué par hélicoptère »
Je lis ce que je prends pour de l’étonnement dans son regard.
« Vous ne l'entendez pas? »
Je fais un signe de tête en direction du ciel. Roger lève les yeux, scrute les nuages, et je devine qu'il entend maintenant le battement des pales et le bruit du moteur qui approchent.
« Vous êtes sérieux? »
Il n'y a aucune joie dans ses paroles; aucune crainte non plus. Juste une terrible incrédulité. Et comme pour lui répondre, l'hélicoptère
passe en rase-motte au-dessus de nous dans un vacarme assourdissant et le sifflement de ses turbines. L'air se fait soudain plus épais, tourbillonne, les branches s'agitent tels des bras affolés. Je regarde l'appareil décrire un grand arc de cercle puis se poser dans une pâture toute proche, où les autres pompiers se sont préparés pour l’atterrissage. Le jaune criard de sa carlingue détonne avec le vert profond de la végétation.
Je me tourne à nouveau vers Roger. J'ouvre la bouche pour plaisanter mais les mots meurent sur mes lèvres.
Il vient d'attraper ma main et serre le bout de mes doigts en tremblant, à la manière d'un époux qui étreint celle de sa femme sur son lit de mort. Sa prise se fait un peu plus forte pour ne pas glisser sur le latex de mes gants. Ses yeux plantés dans les miens deviennent brillants et de grosses larmes en débordent avant de rouler sur ses joues. Je n'arrive pas à me détacher de ce regard qui me cloue sur place, et sans que je le veuille, je m'y abandonne, plongée vertigineuse vers les tréfonds et les malheurs de l’âme d'un homme qui ne croit plus en être un, qui a oublié la valeur de sa vie. C'est atroce, insupportable.
Inhumain.
Alors que je m'enfonce, les pièces du puzzle s'assemblent, implacables, terribles dans leur réalité et leur simplicité. Elles ne font qu'accroître la vitesse à laquelle je tombe. Je dois réagir, vite. Il me faut un parachute. Ma gorge s'est nouée, les yeux me piquent et je commence à me mordiller les lèvres. Ne pas pleurer. Non, Je dois résister.
C'est l'arrivée de l'équipe médicale qui me sort de ma torpeur. Je m'écarte pour lui laisser la place. Mon travail s'arrête ici, ils vont prendre le relais. J'adresse un sourire à Roger avant de m'éloigner de quelques pas, une boule douloureuse au fond de la gorge.
Mes gants, collés à ma peau par la sueur, claquent comme des élastiques quand je les enlève. Je marche un peu pour récupérer. La tension retombe. Je réalise que je suis encore essoufflé de ma course de tout à l'heure. Les poumons me brûlent à nouveau et le sang me martèle les tempes. Mes jambes sont douloureuses. C'est comme si mon cerveau s'était déconnecté et décidait de se remettre en marche.
Un gars de l'autre caserne vient me parler et je lui réponds la première chose qui me passe par l'esprit. Me propose une cigarette que je
refuse. M'explique qu'il s’amusait dans sa piscine avec ses gosses quand son bip a sonné et qu'il est en maillot de bain sous sa tenue. Je finis par sourire, car c'est ainsi. Je me laisse aller à la conversation, et je réalise trop tard que des collègues brancardent Roger pour l'évacuer. Je voudrais lui faire un petit au-revoir, mais à quoi bon? Je regarde le petit groupe s'éloigner en direction de l'hélicoptère. La douleur revient me nouer la gorge. Fait chier. Je pars ramasser le matériel pour penser à autre chose.
A mon retour chez moi en fin d’après-midi, je finis de tondre du gazon, et comme ça ne va pas, je pars faire un tour à moto. Je roule sans but. Je roule longtemps. Je roule vite, visière ouverte, en espérant sans doute que le vent qui me fouette les pommettes et les yeux peut me laver, m’user la peau jusqu’aux os, m’arracher de la tête ce malaise qui me mine.
Bien entendu, cela ne change rien.
Voilà, c'était il y a cinq jours.
Roger est mort quarante-huit heures après son entrée à l'hôpital.
C'est la vie.
Hier, en marchant «en ville», comme disent les gens du village quand il parle de Lyon, j'ai aperçu un sdf. Il était assis sur un carton crasseux à l'ombre d'un monument, un chien sans race roulé en boule à ses pieds. Il avait mis sur le trottoir une boite en fer blanc toute rouillée contre laquelle s'appuyait un petit écriteau en bois. « Pour mangé. Merci ».
J'ai passé mon chemin. J'ai depuis une étrange amertume au fond de la gorge.
ah oui, tu as retiré les répétitions du début (deux minutes) et changé quelques trucs. t'as bien fait
J'ai bien aimé avec les quelques modification.
Bonne après-midi
Bonne après-midi
Allez, vu que ça avance, voici le communiqué de presse que m'a fait Kiro (je suis en contact avec trois magazines moto, ceci expliquant cela):
félicitations et longue vie à ce recueil (si j'avais des sous... c'est pas que je sois motard, ma mobylette estampillée "la poste" 49.9 m'emmène assez loin où je dois aller bosser par tous les temps, mais ton 4ème est alléchant)
Bon, quelques nouvelles (c'est le cas de le dire!).
Je suis assez peu présent sur le forum car bien occupé ailleurs, et entre autre à la promotion de mon livre.
J'ai offert un exemplaire de mon recueil à la bibliothèque de mon village. Bien m'en a pris car l'année prochaine, en 2012 donc, cette structure va fêter ses 20 ans, et pour cela, va organiser de nombreuses manifestations, dont des rencontres entre les auteurs locaux et les lecteurs pour des séances de dédicaces, de lecture de textes, etc, ainsi qu'un (petit) salon du livre. Je devrais être l'invité d'honneur vu que, comme me l'a dit la responsable, plus local que moi, il n'y a pas (j'habite bien à 150m de la bibliothèque!).
Ensuite, une librairie spécialisée "motos & motards" m'a référencé il y a une dizaine de jours (cliquez ici pour le site, et là pour voir le catalogue), et après démarchage de ma part, je viens d'être accepté par la librairie de mon village en dépôt-vente, ainsi que dans une Maison de la Presse dans la ville voisine. Bon, ce ne sont pas encore les grandes enseignes, mais c'est déjà ça!
Qui plus est, suite à l'envoi d'un "service-presse", un des trois grands magazines motos nationaux (clic ici) va faire un article sur mon recueil dans son édition de janvier.
La cerise sur le gâteau? Lundi, j'ai eu la visite d'une correspondante locale d'un très grand quotidien régional, Le Progrès (de Lyon) pour la parution d'un article sur ce recueil. L'article a été finalisé ce matin et envoyé au journal, il doit paraître d'ici à quelques jours selon la place disponible car il avoisine le 1/3 de page.
Pour ceux qui se posent la question: j'ai préféré démarcher moi-même les deux distributeurs de presse pour faire jouer à fond la fibre "locale", et j'ai été très bien accueilli.
Pour ce qui est de la journaliste, je ne la connais pas personnellement mais, du temps où j'étais sapeur-pompier volontaire, nous nous sommes parfois croisés sur des interventions. Je me suis souvenu de son nom, donc j'ai tenté ma chance, et voilà.
Bon, rien n'est gagné, le chemin est encore long, très long, mais là, franchement, je suis content!
Je suis assez peu présent sur le forum car bien occupé ailleurs, et entre autre à la promotion de mon livre.
J'ai offert un exemplaire de mon recueil à la bibliothèque de mon village. Bien m'en a pris car l'année prochaine, en 2012 donc, cette structure va fêter ses 20 ans, et pour cela, va organiser de nombreuses manifestations, dont des rencontres entre les auteurs locaux et les lecteurs pour des séances de dédicaces, de lecture de textes, etc, ainsi qu'un (petit) salon du livre. Je devrais être l'invité d'honneur vu que, comme me l'a dit la responsable, plus local que moi, il n'y a pas (j'habite bien à 150m de la bibliothèque!).
Ensuite, une librairie spécialisée "motos & motards" m'a référencé il y a une dizaine de jours (cliquez ici pour le site, et là pour voir le catalogue), et après démarchage de ma part, je viens d'être accepté par la librairie de mon village en dépôt-vente, ainsi que dans une Maison de la Presse dans la ville voisine. Bon, ce ne sont pas encore les grandes enseignes, mais c'est déjà ça!
Qui plus est, suite à l'envoi d'un "service-presse", un des trois grands magazines motos nationaux (clic ici) va faire un article sur mon recueil dans son édition de janvier.
La cerise sur le gâteau? Lundi, j'ai eu la visite d'une correspondante locale d'un très grand quotidien régional, Le Progrès (de Lyon) pour la parution d'un article sur ce recueil. L'article a été finalisé ce matin et envoyé au journal, il doit paraître d'ici à quelques jours selon la place disponible car il avoisine le 1/3 de page.
Pour ceux qui se posent la question: j'ai préféré démarcher moi-même les deux distributeurs de presse pour faire jouer à fond la fibre "locale", et j'ai été très bien accueilli.
Pour ce qui est de la journaliste, je ne la connais pas personnellement mais, du temps où j'étais sapeur-pompier volontaire, nous nous sommes parfois croisés sur des interventions. Je me suis souvenu de son nom, donc j'ai tenté ma chance, et voilà.
Bon, rien n'est gagné, le chemin est encore long, très long, mais là, franchement, je suis content!
ah ben t'as raison, ça démarre sur les chapeaux de roues si je puis m'exprimer ainsi. bonne continuation, donc (vais voir les liens maintenant )
Bon, en attendant un lien valide (car le journal verrouille certaines parties des articles pour les abonnés), voici une copie d'écran que m'a envoyée la journaliste. Il s'agit de l'article qui est paru ce matin même dans le progrès (de Lyon), et qui avoisine les 3/4 e pages, rien que ça (j'y croyais pas en ouvrant le journal!)
super cet article. c'est bien tu vas ramener du fric à kiro allez, 25 000 exemplaires et t'explose la planete. que le succès t'accompagne
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